Le secteur aéronautique marocain est aujourd’hui l’un des piliers les plus dynamiques de l’industrie nationale. En l’espace de vingt ans, le pays a su mettre en place un véritable cluster technologique structuré autour de Casablanca, Tanger, Rabat et Fès. Plus de 150 entreprises sont implantées, générant un chiffre d’affaires annuel de 2,5 milliards d’euros et offrant 26 000 emplois qualifiés. Midparc, à Nouaceur, est devenu une référence dans la région, attirant des leaders tels qu’Airbus, Boeing, Safran, Spirit AeroSystems ou encore Stelia.
Ce positionnement stratégique repose sur une équation gagnante : stabilité politique, infrastructure logistique performante, formation d’ingénieurs en croissance et coût de production compétitif. Le Maroc propose une moyenne de 25 €/heure contre 100 à 120 € dans les pays occidentaux. Une donnée décisive pour les investisseurs étrangers.
Khalid SAFIR, directeur général de la Caisse de Dépôt et de Gestion, le souligne :
« Le secteur aéronautique marocain est une véritable success story, fruit d’une vision partagée et d’un effort collectif. Avec plus de 20 000 emplois créés et un taux d’intégration dépassant les 40 %, ce secteur est devenu un levier incontournable du développement économique. »
L’objectif affiché d’ici 2025 est d’atteindre un taux d’intégration de 50 %, soit la moitié des composants produits localement. Une performance rare dans les pays émergents, qui témoigne de la volonté du Royaume de capter davantage de valeur dans la chaîne de production mondiale. Chaque année, 23 000 ingénieurs sont diplômés au Maroc, dont 400 spécifiquement formés aux métiers de l’aéronautique. Ce capital humain est l’un des atouts majeurs pour accompagner la croissance du secteur.
Des performances à l’export qui confirment le positionnement mondial
L’année 2024 a confirmé la montée en puissance du Maroc dans la chaîne de valeur mondiale. Les exportations aéronautiques ont atteint 26,4 milliards de dirhams, soit environ 2,5 milliards d’euros. En progression de 14,9 % par rapport à 2023, elles traduisent une dynamique forte, avec une croissance de 243 % sur la dernière décennie. Deux segments sont en particulier en plein essor : l’assemblage, qui représente 17,2 milliards de dirhams (+23,6 %), et les systèmes de câblage électrique, dont la croissance dépasse les 13 % début 2025.
Ryad MEZZOUR, ministre de l’Industrie et du Commerce, rappelle les fondements de cette trajectoire :
« Sous la direction de Sa Majesté Mohammed VI, une industrie aéronautique solide s’est construite au cours des deux dernières décennies, offrant aujourd’hui un grand potentiel d’opportunités pour les acteurs mondiaux du secteur. »
Le contrat signé avec Casablanca Aéronautique pour la production de pièces du Boeing 737 MAX illustre ce positionnement de fournisseur stratégique. D’autres projets sont en cours, notamment dans les domaines de l’aménagement cabine, du train d’atterrissage et de la maintenance prédictive.
Le Royaume participe activement aux grands salons internationaux, renforçant ainsi sa visibilité auprès des grands donneurs d’ordre. Cette stratégie d’ouverture et de visibilité se double d’un effort de montée en gamme : le Maroc n’est plus seulement une base de sous-traitance, mais devient progressivement un acteur de production de composants complexes.
« Le Maroc est aujourd’hui capable de produire n’importe quelle pièce d’un avion. L’objectif est désormais de nous diriger vers l’assemblage final », affirme Ryad MEZZOUR. Une ambition qui ne relève plus du fantasme industriel, mais d’un cap réaliste, soutenu par des partenariats technologiques et un environnement de production mature.
Une vision stratégique à l’horizon 2030 : doubler les emplois et atteindre 5 milliards de dollars de CA
L’aéronautique fait l’objet d’une vision politique affirmée, qui dépasse la simple logique industrielle. L’objectif est de faire du Maroc un hub régional de premier plan, en Afrique comme sur l’axe atlantique-méditerranéen. Cette ambition repose sur trois leviers : la formation, l’innovation et la coopération stratégique.
Le développement des compétences est au cœur de cette stratégie. En plus des 400 ingénieurs spécialisés formés chaque année, les établissements de formation adaptent leurs programmes à l’évolution des besoins technologiques. Des cursus sont dédiés à l’ingénierie électrique embarquée, aux matériaux composites, à la cybersécurité aéronautique et à l’analyse de données pour la maintenance prédictive.
Côté innovation, les investissements en R&D restent encore limités mais progressent. Plusieurs entreprises marocaines émergent sur des segments à forte valeur ajoutée, comme l’impression 3D de composants, les tests non destructifs ou encore les logiciels de modélisation. Le développement de centres de certification et d’essais est également prévu.
Sur le plan des partenariats, la coopération entre Royal Air Maroc et Safran sur le moteur CFM Leap est emblématique. La compagnie nationale envisage également une commande d’Airbus A220, modèle plus léger et plus économique, pour renforcer sa flotte moyen-courrier et favoriser l’intégration industrielle locale.
Abdessamad KAYOUH, ministre des Transports et de la Logistique, résume l’approche gouvernementale :
« Notre participation aux grands salons de l’aéronautique s’inscrit dans la Vision Royale de faire du Maroc un hub majeur, au niveau africain mais aussi méditerranéen. Le transport aérien est une priorité stratégique. »
Le cap est clair : atteindre 5 milliards de dollars de chiffre d’affaires d’ici 2030 et doubler le nombre d’emplois. Pour cela, le Maroc devra intensifier l’accompagnement des PME, stimuler l’émergence de champions nationaux et renforcer sa position dans les appels d’offres internationaux.
Chiffres clés de l’aéronautique au Maroc
- 150 entreprises du secteur
- 26 000 emplois directs en 2024
- 2,5 Mds € de chiffre d’affaires annuel
- +243 % de croissance des exportations en 10 ans
- 43 % de taux d’intégration locale (objectif 50 % en 2025)
- 25 €/heure de coût moyen de production
- 400 ingénieurs aéronautiques formés chaque année
- Objectif 2030 : 5 Mds $ de CA et doublement des emplois