Le Center for World University Rankings (CWUR) vient de dévoiler son classement 2025, recensant les 2 000 meilleures universités sur les 21 462 établissements analysés à travers le monde. Dans ce palmarès international scruté par les gouvernements, les chercheurs et les recruteurs, cinq universités marocaines parviennent à se distinguer. Un résultat qui n’a rien d’anecdotique, tant le CWUR est reconnu pour sa rigueur méthodologique et l’objectivité de ses critères.
Ce classement, qui évalue la performance des universités selon des indicateurs quantitatifs et vérifiables, consacre cette année l’Université Mohammed V de Rabat comme premier établissement marocain, à la 992e position mondiale, devant quatre autres institutions nationales : Cadi Ayyad, Hassan II, Mohammed Premier et Sidi Mohamed Ben Abdellah. À l’heure où la compétitivité académique devient un enjeu stratégique pour l’Afrique, cette présence récurrente du Maroc dans le classement CWUR traduit une évolution tangible du système universitaire marocain.
Un classement fondé sur des données mesurables, loin de toute subjectivité
Créé en 2012, le CWUR s’impose comme l’un des classements internationaux les plus objectifs. Contrairement à d’autres palmarès comme le QS ou le THE, il ne repose ni sur des sondages d’opinion, ni sur des questionnaires envoyés aux établissements, mais sur l’analyse quantitative de la performance académique et scientifique.
La méthodologie du CWUR s’articule autour de quatre grandes dimensions pondérées : l’éducation (25 %), mesurée par le succès académique des anciens élèves ; l’employabilité (25 %), qui évalue leur trajectoire professionnelle ; la qualité du corps professoral (10 %), en fonction des distinctions obtenues ; et la recherche (40 %), selon la productivité scientifique, la diffusion dans des revues prestigieuses, l’influence des publications et leur taux de citation.
Cette architecture permet de dresser un portrait complet et comparatif des établissements d’enseignement supérieur, en s’appuyant sur des bases de données internationales telles que Web of Science. Le CWUR évalue ainsi non seulement la qualité de l’enseignement, mais aussi l’impact réel de la recherche produite et la capacité des diplômés à s’insérer sur le marché du travail.
Une progression constante pour les universités marocaines
L’Université Mohammed V de Rabat conserve son statut de leader national en atteignant la 992e place mondiale, en progression de 15 rangs par rapport à 2024. Elle figure également dans le top 15 africain et dans le top 15 des universités du monde arabe. Ce résultat s’explique en grande partie par l’amélioration de ses performances en recherche scientifique, notamment grâce à une production académique mieux référencée et davantage citée.
Derrière elle, l’Université Cadi Ayyad de Marrakech (1 128e mondiale) confirme sa régularité, tout comme l’Université Hassan II de Casablanca (1 154e) et l’Université Mohammed Premier d’Oujda (1 357e). La nouveauté cette année vient de Fès : l’Université Sidi Mohamed Ben Abdellah fait son entrée dans le classement mondial, à la 1 901e position.
Cette présence continue, pour la sixième année consécutive, illustre une dynamique structurelle du système universitaire marocain, qui ne se limite plus à quelques établissements d’élite mais touche progressivement un ensemble plus large d’universités régionales.
Apparaître dans un classement mondial comme le CWUR a des effets directs sur l’image et la réputation des universités marocaines. D’une part, cela renforce la confiance des étudiants nationaux et étrangers dans la qualité de l’enseignement dispensé au Maroc. D’autre part, cela facilite les partenariats internationaux, les projets de recherche collaboratifs et l’accueil de professeurs visiteurs de haut niveau.
Mais au-delà de la reconnaissance, ces classements ont une valeur stratégique pour les directions d’université et les décideurs publics. Ils permettent d’identifier les marges de progression dans la gouvernance académique, la recherche, la valorisation des publications, et la liaison avec le tissu économique. Le critère d’employabilité, notamment, pousse les établissements à mieux connecter leurs programmes à la réalité du marché de l’emploi.
En cela, le CWUR agit comme un outil de pilotage : il ne se contente pas de classer, il oriente, il incite à la réforme. Et dans un pays comme le Maroc, engagé dans une refonte de son modèle de développement, l’élévation du niveau de l’enseignement supérieur devient un levier d’émergence économique.
Une lecture croisée avec les autres classements mondiaux
Le CWUR ne constitue pas une vérité absolue. Il s’inscrit dans un écosystème plus large de classements, chacun avec ses partis pris méthodologiques. Le QS World University Rankings, par exemple, accorde une importance majeure à la réputation académique et à l’internationalisation. Le Times Higher Education (THE) introduit des indicateurs sur la qualité de l’enseignement et les revenus issus de l’industrie. Le classement de Shanghai (ARWU), quant à lui, se concentre sur la recherche pure et la reconnaissance académique à travers les prix Nobel ou les publications dans Nature et Science.
Chacun de ces classements offre une lecture complémentaire. Le CWUR a pour mérite de ne pas se reposer sur des déclarations subjectives ni sur des perceptions, mais sur des données tangibles. Il s’avère donc particulièrement utile pour les États et les agences de développement qui souhaitent investir dans des établissements à fort potentiel sans être influencés par l’effet d’image.
À l’échelle africaine et arabe, la progression du Maroc dans les classements internationaux lui confère une position d’influence nouvelle. Dans un continent où la demande en enseignement supérieur explose, la capacité à offrir des formations de qualité, à encadrer la recherche et à diffuser le savoir devient un élément déterminant de puissance douce.
Le classement CWUR 2025, en mettant en lumière les progrès du Maroc, renforce aussi la crédibilité du pays dans les discussions internationales sur les standards de qualité, l’assurance qualité académique ou encore la reconnaissance des diplômes. Il ouvre la voie à davantage de coopération avec les agences d’accréditation, les bailleurs de fonds et les partenaires scientifiques.
Pour transformer ces bons résultats en avancée structurelle, il est crucial que les pouvoirs publics accompagnent les universités avec des moyens adaptés : financement pérenne de la recherche, soutien à la mobilité internationale des enseignants, simplification des procédures administratives, incitations à la publication scientifique, et renforcement des alliances avec le secteur privé.
Le Maroc dispose aujourd’hui des bases d’un écosystème académique crédible. Il lui reste à construire une stratégie nationale de rayonnement, cohérente, inclusive et ambitieuse, pour faire de l’enseignement supérieur un moteur réel de transformation économique et sociale. Les universités marocaines sont prêtes à franchir un cap. Encore faut-il leur donner les moyens d’aller au bout de leur promesse.