Le Groupe OCP, acteur mondial incontournable des engrais phosphatés, n’est pas seulement un champion industriel : il s’impose comme un moteur stratégique pour l’avenir du Maroc et de l’Afrique. Dans un contexte marqué par les défis de la sécurité alimentaire, du changement climatique et de la compétition internationale, Mostafa Terrab défend une vision où le phosphate marocain n’est pas une fin en soi, mais un levier de développement humain, scientifique et économique. Son entretien avec Le Matin illustre une orientation claire : placer le capital humain, l’innovation et l’ancrage africain au cœur d’une stratégie qui dépasse la seule exploitation minière pour façonner un modèle durable et inclusif à l’horizon 2050.
Une mission universelle portée par le Maroc et l’Afrique
La mission d’OCP se résume par une formule claire : «Bring phosphorus to life». Derrière cette expression se cache un double engagement. D’un côté, garantir l’accès au phosphore, élément vital pour la production agricole et donc pour la sécurité alimentaire mondiale. De l’autre, donner toute sa valeur au phosphate marocain, ressource stratégique dont le Royaume détient près de 70% des réserves mondiales de haute qualité. Pour Mostafa Terrab, cette mission s’adresse à la fois au pays, au continent et au monde, et confère à OCP une responsabilité unique.
L’Afrique occupe une place centrale dans cette vision. Terrab insiste sur le fait qu’elle n’est pas un simple marché, mais «notre continent, notre chez-nous». Le groupe agit en Afrique avec la même énergie qu’au Maroc, conformément à l’esprit impulsé par le Roi Mohammed VI. Dans un continent qui reste le moins consommateur d’engrais au monde, l’enjeu est colossal : accélérer le rattrapage agricole et contribuer à la souveraineté alimentaire. OCP se positionne ainsi non seulement comme un producteur d’engrais, mais comme un partenaire stratégique du développement agricole africain, ancré dans une vision panafricaine assumée.
Savoir et innovation : un levier stratégique incontournable
Pour OCP, il n’existe pas d’industrie compétitive et durable sans investissement massif dans le savoir. Cette conviction a conduit à la création de l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), véritable laboratoire d’innovation appliquée. Plus de la moitié de ses programmes sont directement liés aux besoins industriels et agricoles : formulation d’engrais adaptés aux sols africains, procédés industriels bas carbone, solutions numériques pour l’agriculture ou encore technologies de traitement de l’eau. L’université joue un double rôle : pilier de recherche et développement pour le groupe, et incubateur de talents pour le Maroc et l’Afrique.
L’UM6P dépasse cependant les besoins internes d’OCP. Très vite, elle s’est ouverte aux étudiants marocains et africains, souvent boursiers, afin de devenir un catalyseur de compétences pour tout le continent. Cette orientation reflète l’ambition royale de créer une institution tournée vers l’avenir, capable de renforcer la souveraineté scientifique et technologique africaine. Pour Terrab, investir dans l’éducation, c’est investir dans le futur d’OCP, du Maroc et du continent. C’est aussi inscrire la mission du groupe dans une dynamique qui dépasse la seule exploitation minière pour embrasser un modèle fondé sur la connaissance et l’innovation.
La force du capital humain et l’esprit de la «Niya»
Si OCP affiche des résultats financiers solides – 52,17 milliards de dirhams de chiffre d’affaires au premier semestre 2025, en hausse de 21% –, Mostafa Terrab rappelle que la vraie richesse du groupe réside ailleurs : dans son capital humain. À son arrivée, OCP faisait face à une pyramide des âges défavorable. En réponse, le groupe a recruté près de 6.000 jeunes en cinq ans, faisant passer l’âge moyen des effectifs à 35 ans. Ce rajeunissement a transformé la culture interne, insufflant énergie et innovation. Aujourd’hui, les équipes d’OCP incarnent un modèle d’expertise et d’engagement, envié par des concurrents internationaux.
Ce modèle repose sur une philosophie particulière : la «Niya», comprise comme sincérité de l’intention et force de la conviction. Cette approche irrigue la gouvernance du groupe et ses relations avec collaborateurs, fournisseurs et clients. OCP évolue ainsi vers un véritable écosystème, où les sous-traitants deviennent des partenaires porteurs de solutions. Cette transformation s’accompagne d’initiatives concrètes : mise en place de mécanismes financiers innovants, création de fonds d’investissement dédiés et organisation d’une grande conférence d’ici la fin de l’année. La «Niya», selon Terrab, n’est pas une posture, mais un moteur collectif qui permet d’aller plus loin ensemble.
Diversification et ancrage national : préparer OCP à 2050
La vision d’OCP à l’horizon 2050 dépasse le phosphate. Le groupe s’est engagé dans une diversification stratégique indispensable pour sécuriser sa mission. Dans un contexte marqué par le changement climatique, il a investi dans l’eau et l’énergie afin de garantir son autonomie et de ne pas peser sur les ressources destinées aux autres usagers. L’éducation, la recherche et le sport viennent compléter cette démarche. À travers EVO Sport, en partenariat avec la Fédération royale marocaine de football, OCP investit dans la formation des joueurs et des encadrants, professionnalisant ainsi l’écosystème sportif national.
Sur le plan financier, OCP s’appuie sur un choix stratégique : la mobilisation des banques marocaines. Si une partie des investissements a été levée à l’international, le recours massif au système bancaire national illustre la solidité de l’écosystème financier marocain et la volonté du groupe de rester ancré dans l’économie du pays. Pour Terrab, ce choix démontre que l’avenir d’OCP repose non seulement sur ses mines et ses usines, mais aussi sur un modèle intégré où le capital humain, les ressources locales et la vision à long terme se conjuguent. En résumé, «la plus grande richesse du Maroc, ce sont ses femmes et ses hommes. Tout part du capital humain, et tout y revient».
Source : Entretien de Mostafa Terrab avec Le Matin.







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