L’admission de 24 élèves marocains à l’École Polytechnique Paris, promotion 2025, marque une progression notable de la présence marocaine dans les plus hautes sphères académiques françaises. Cette école, surnommée « l’X », est reconnue comme l’un des établissements les plus prestigieux au monde pour la formation des ingénieurs, avec un concours d’entrée réputé pour sa difficulté extrême. Réservé aux élèves des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE), il combine des épreuves écrites très techniques en mathématiques, physique, chimie ou sciences industrielles, et un oral sélectif axé sur la rigueur intellectuelle et la capacité d’analyse.
Sur les 56 candidats marocains ayant accédé aux épreuves écrites, 24 ont franchi toutes les étapes pour figurer parmi les 400 admis internationaux. Ce ratio place le Maroc parmi les pays les plus performants d’Afrique en matière d’intégration dans les grandes écoles scientifiques françaises. Une réussite qui souligne à la fois la solidité du modèle CPGE marocain, inspiré du système français, et l’investissement personnel de ces étudiants dans un parcours d’exception.
Un système éducatif sous tension, mais générateur d’élites
Ce succès revêt une dimension particulière au regard des difficultés structurelles du système éducatif marocain. Manque de moyens, inégalités d’accès, encadrement insuffisant : autant de défis qui font régulièrement débat. Pourtant, certains établissements, publics comme privés, parviennent à maintenir un haut niveau de préparation aux concours internationaux.
Le profil des élèves admis à Polytechnique reflète souvent un parcours scolaire d’excellence depuis le secondaire, une maîtrise des fondamentaux scientifiques, mais aussi une résilience remarquable. Cette réussite collective démontre que le Maroc peut faire émerger des élites scientifiques capables de répondre aux standards des meilleures institutions mondiales, à condition de leur offrir les conditions adéquates de formation, d’encadrement et de projection.
Cette performance met aussi en lumière le rôle crucial des enseignants de CPGE marocains, souvent méconnus, mais dont le travail de fond permet aux étudiants d’atteindre des niveaux de compétence avancés dans des disciplines exigeantes.
L’École Polytechnique : une formation unique entre science, humanisme et rigueur
Intégrer Polytechnique ne signifie pas seulement accéder à une formation scientifique de très haut niveau. C’est aussi suivre un parcours pluridisciplinaire incluant une formation humaine, éthique, et militaire. Les élèves polytechniciens suivent un premier cycle axé sur les sciences fondamentales (mathématiques, physique, informatique, chimie), avant de se spécialiser dans des domaines allant de l’ingénierie à l’intelligence artificielle, en passant par l’économie ou la défense.
L’école mise également sur l’esprit d’équipe, l’engagement civique, et la capacité à intervenir dans des contextes complexes. Cette philosophie de formation vise à produire des ingénieurs citoyens, prêts à occuper des responsabilités dans l’industrie, la recherche, l’armée ou la haute administration. Pour les élèves marocains admis, ce modèle représente un changement de cadre exigeant mais formateur, avec une adaptation culturelle et académique à mener dès septembre 2025.
Des partenariats franco-marocains au service de la performance
L’accès de ces 24 élèves à Polytechnique s’inscrit aussi dans un contexte de coopération académique croissante entre le Maroc et la France. L’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), basée à Benguérir, a notamment noué des partenariats avec l’X dans les domaines de la recherche, de l’innovation pédagogique, et de la formation doctorale.
Cette convergence entre institutions traduit une volonté partagée de renforcer la mobilité étudiante et le rayonnement scientifique du Maroc sur la scène internationale. Elle contribue à créer des passerelles durables pour les jeunes talents, tout en renforçant l’écosystème local autour des sciences et de la technologie.
Le Maroc, qui ne dispose pas encore de statistiques nationales consolidées sur le nombre de lauréats aux grandes écoles françaises, gagnerait à institutionnaliser ces indicateurs. Ils permettraient d’identifier les dynamiques régionales de réussite, d’ajuster les politiques de soutien aux CPGE, et de suivre l’impact des coopérations internationales sur la formation des élites scientifiques.
Un symbole fort pour la jeunesse scientifique marocaine
L’impact de cette réussite dépasse les murs de l’École Polytechnique. Elle constitue une source d’inspiration pour des milliers de lycéens et d’étudiants marocains engagés dans des filières scientifiques. Voir leurs pairs accéder à une institution aussi prestigieuse démontre que l’excellence est possible, même dans un environnement souvent jugé défavorable. Ce type de parcours exemplaire permet de déconstruire certaines idées reçues sur l’élitisme académique et de valoriser les compétences scientifiques « made in Morocco ».
De plus, cette réussite alimente le débat sur l’orientation et l’accompagnement des élèves à fort potentiel. Faute de dispositifs structurés à grande échelle, de nombreux talents passent encore sous les radars. La mise en place d’un programme national d’identification et de soutien des profils scientifiques d’excellence pourrait permettre de démocratiser ces trajectoires, en s’appuyant sur des acteurs existants comme l’OFPPT, les académies régionales ou les établissements partenaires.
Vers un modèle d’enseignement scientifique marocain plus ambitieux ?
La réussite des 24 élèves marocains à Polytechnique ne saurait masquer les disparités du système. Mais elle constitue un signal précieux sur les axes de progrès possibles. Un enseignement scientifique renforcé dès le collège, une meilleure valorisation des métiers de l’enseignement, un accès plus équitable aux CPGE et une culture de l’excellence pourraient redessiner les contours d’un modèle marocain performant et inclusif.
Pour les DRH et décideurs en charge des politiques éducatives ou industrielles, cette actualité invite à repenser l’articulation entre formation scientifique, innovation et employabilité. Comment transformer ces parcours individuels d’excellence en leviers collectifs pour l’économie nationale ? Comment faire émerger des filières technologiques de haut niveau, capables de retenir ou de rapatrier ces talents formés à l’international ? Ces questions méritent une réflexion stratégique, au-delà de la seule logique de classement.
Un avenir à construire, au Maroc ou ailleurs
L’entrée à Polytechnique est une étape. Le véritable enjeu commence après : comment ces jeunes mettront-ils leur expertise au service du développement ? Une partie d’entre eux poursuivra probablement une carrière à l’international, d’autres choisiront de revenir pour créer, innover, transmettre.
Le défi pour le Maroc n’est pas seulement d’envoyer ses talents dans les meilleures écoles, mais de créer les conditions pour qu’ils puissent ensuite contribuer activement à la transformation du pays. Cela passe par des ponts solides entre l’enseignement supérieur, le monde de la recherche, l’entreprise et les politiques publiques.
La sélection de 24 Marocains à l’École Polytechnique de Paris est bien plus qu’une performance académique. C’est l’expression d’un potentiel en devenir, d’un système qui, malgré ses fragilités, est capable de former des profils de haut niveau. C’est aussi un appel à l’action pour institutionnaliser l’excellence scientifique, mieux repérer les talents, et bâtir les conditions d’un futur où l’intelligence marocaine rayonne sur la scène mondiale — depuis Paris, mais aussi depuis Casablanca, Benguérir ou Fès.







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