Derrière le lancement de l’Université Internationale Averroès se cache une trajectoire riche en enseignements. Entre ambitions académiques, tensions institutionnelles, renforcement capitalistique et repositionnement identitaire, retour sur deux années de construction pour cette université privée implantée à Casablanca.
Université Atlantique : un lancement fondé sur l’héritage académique de l’ESIG
Le 25 juillet 2023, les promoteurs de l’Université Atlantique de Casablanca (UNA) annoncent publiquement l’ouverture de leur établissement pour la rentrée universitaire 2023/2024. Dans leur communiqué, ils présentent leur projet comme un « pôle universitaire d’excellence » regroupant plusieurs écoles supérieures délivrant des diplômes de grade Licence (Bac+3) et Master (Bac+5). Les filières couvrent des disciplines variées : ingénierie financière, intelligence artificielle, cybersécurité, droit, sciences politiques, ou encore marketing digital.
Pour structurer son lancement, le groupe s’appuie sur l’intégration d’un acteur historique du paysage de l’enseignement privé au Maroc : l’École Supérieure Internationale de Gestion (ESIG), fondée en 1985. Rebaptisée Atlantic Business School, l’école devient la première entité opérationnelle du groupe. Une école d’ingénieurs, Atlantic Engineering School, est également lancée, marquant une volonté de diversification académique dès les débuts.
Le groupe est dirigé par le Professeur Rachid M’Rabet, ancien DG de l’ISCAE, et rassemble autour de lui des profils de haut niveau : Younes Slaoui (Odyssey International), Mehdi Tazi (Marsh Maroc), Mohamed Hdid (cabinet Hdid & Associés), Moncef El Kharroubi (ancien de Wafacash), et Abdellatif Maâzouz, président de la région Casablanca-Settat. L’objectif est clair : positionner Casablanca comme hub de formation supérieure d’excellence à vocation africaine, avec un campus pouvant accueillir jusqu’à 2.500 étudiants.
Université Atlantique : un rappel réglementaire qui recentre le projet
Deux jours seulement après l’annonce, le ministère de l’Enseignement supérieur, dirigé par Abdellatif Miraoui, publie un communiqué tranchant. Il y est précisé que l’Université Atlantique n’a pas encore obtenu l’agrément officiel l’autorisant à exercer en tant qu’université privée.
Le ministère insiste sur la nécessité pour les médias de vérifier leurs sources et rappelle que seules les institutions listées sur son site officiel disposent d’une reconnaissance légale. L’intervention vise clairement à tempérer les annonces des promoteurs de l’université, et jette le doute sur la légitimité du lancement prévu en septembre.
L’affaire prend une dimension politique en raison de la présence d’Abdellatif Maâzouz, président d’une région, au tour de table de l’université. Pour les porteurs du projet, cet épisode constitue un rappel sévère à l’importance du cadre réglementaire et à la nécessité de maîtriser la communication institutionnelle dans un secteur aussi sensible que celui de l’enseignement supérieur.
Université Atlantique : un partenaire institutionnel pour consolider les ambitions
Malgré le coup d’arrêt temporaire imposé par le ministère, le projet ne s’essouffle pas. Mieux, il se renforce.
En mars 2024, CDG Invest, la branche investissement de la Caisse de Dépôt et de Gestion (CDG), officialise son entrée au capital de l’Université Atlantique. Le montant de l’opération : 10 millions de dirhams contre 20 % de participation dans le capital. L’opération est notifiée au Conseil de la Concurrence, conformément à la réglementation sur les concentrations économiques.
Cette levée de fonds marque un tournant dans la trajectoire de l’établissement. Pour CDG Invest, il s’agit d’un investissement stratégique dans un secteur en pleine croissance et au fort impact sociétal. Pour l’université, c’est une reconnaissance institutionnelle qui renforce sa crédibilité, permet de consolider son modèle économique et d’envisager une montée en puissance rapide.
L’injection de capital est destinée à financer l’extension du campus, le développement de nouvelles filières, le recrutement de professeurs de haut niveau, mais aussi à soutenir la structuration de l’université comme acteur à part entière de l’écosystème académique marocain.
Université Atlantique devient Université Internationale Averroès : une nouvelle identité porteuse de sens
Presque deux ans après les débuts mouvementés de l’UNA, le projet franchit une nouvelle étape décisive en mai 2025 : l’Université Atlantique change de nom et devient Université Internationale Averroès de Casablanca.
Ce changement intervient dans un contexte réglementaire clarifié : lors de sa réunion du 25 avril 2025, la Commission Nationale de Coordination de l’Enseignement Supérieur (CNACES) a officiellement accordé le statut d’université privée à l’établissement. L’annonce intervient dans la foulée, marquant la clôture d’un cycle de régularisation et de montée en maturité.
La nouvelle identité adoptée n’est pas anodine. Averroès, ou Ibn Rochd, est une figure emblématique de la philosophie arabo-andalouse, symbole de savoir, de rationalité et de dialogue entre les civilisations. En choisissant ce nom, l’université affiche une ambition intellectuelle et universaliste, qui dépasse les frontières marocaines tout en s’appuyant sur un ancrage culturel fort.
Trois écoles structurent désormais l’université :
- Averroès Business School
- Averroès Engineering School
- Averroès School of Law and Politics
L’offre académique s’enrichit d’un Executive Center et d’un centre de recherche appliquée. Le nouveau campus, situé route de Nouaceur à Casablanca, se veut un lieu d’excellence, pensé pour favoriser l’apprentissage par projet, les interactions interdisciplinaires et l’insertion professionnelle via un modèle d’alternance.
Université Internationale Averroès : un modèle académique tourné vers l’Afrique et la responsabilité sociale
Avec ce repositionnement stratégique, l’Université Internationale Averroès confirme sa volonté de jouer un rôle clé dans le développement du capital humain en Afrique. Le nouveau directeur général, Nabil Cherkaoui, a affirmé que l’université formera des « leaders praticiens » au contact direct des réalités économiques.
Un modèle d’alternance innovant est mis en place, permettant aux étudiants de conjuguer apprentissage théorique et immersion professionnelle. L’université s’engage aussi dans une dynamique de responsabilité sociale : une fondation interne distribue des bourses aux étudiants méritants, contribuant à l’inclusion et à l’égalité des chances.
Le lancement officiel a été marqué par une intervention du ministre Younes Sekkouri, venu rappeler le rôle crucial des établissements privés dans l’inclusion économique et la formation des compétences de demain.
En deux ans, l’Université Internationale Averroès a su transformer les turbulences de ses débuts en leviers de renforcement. Appuyée sur un capital académique solide, des actionnaires engagés et un soutien institutionnel de poids, elle s’inscrit désormais parmi les établissements les plus prometteurs de l’enseignement supérieur privé au Maroc. Entre rigueur, ambition et repositionnement maîtrisé, elle entend participer activement au rayonnement académique du Royaume sur le continent.







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