Alors que les derniers chiffres du Haut-Commissariat au Plan (HCP) indiquent une création nette de 282.000 emplois au 1er trimestre T1 2025, un examen attentif des données révèle une réalité plus contrastée. Si les indicateurs conjoncturels sont encourageants, la qualité des emplois créés pose question, notamment au regard de la forte progression du sous-emploi, qui capte près des deux tiers des nouveaux postes.
Une croissance nette… mais déséquilibrée
L’économie marocaine enregistre, pour le troisième trimestre consécutif, une hausse annuelle de la création nette d’emplois. Le gain de 282.000 postes s’explique principalement par la performance du milieu urbain (+285.000), tandis que le milieu rural accuse une perte limitée de 3.000 emplois, signalant une possible stabilisation après plusieurs trimestres de dégradation.
Cette dynamique s’est traduite par une légère baisse du taux de chômage national, désormais établi à 13,3 % contre 13,7 % un an auparavant. Toutefois, des écarts structurels persistent : le chômage reste plus élevé chez les jeunes (37,7 %), les femmes (19,9 %) et les diplômés (19,4 %).
Le sous-emploi, indicateur d’une fragilité structurelle
L’une des tendances les plus préoccupantes concerne le sous-emploi, dont le taux est passé de 10,3 % à 11,8 % en un an. En valeur absolue, le nombre de personnes concernées s’élève à 1.254.000, soit une hausse de 185.000 personnes.
Rapporté à la création nette d’emplois, cela signifie que 66 % des nouveaux postes relèvent du sous-emploi, c’est-à-dire des emplois à temps partiel involontaire, sous-payés, instables ou peu qualifiants. La détérioration est plus marquée en milieu rural (14,8 %, +2,3 points) qu’en milieu urbain (12,5 %).
Emploi rémunéré en hausse, non rémunéré en repli
Sur le plan qualitatif, une note positive peut être relevée : l’emploi rémunéré a progressé de 319.000 postes, tandis que l’emploi non rémunéré (souvent familial ou informel) poursuit son repli entamé début 2023, avec une baisse de 37.000 postes.
Il est probable que cette évolution favorable soit en partie attribuable à des facteurs saisonniers, notamment la nature cyclique de l’activité agricole et les précipitations abondantes de mars 2025, qui ont renforcé l’emploi rural ponctuellement.
Enjeux RH : vers une meilleure qualité de l’emploi
Au-delà des chiffres, ces évolutions interpellent les DRH sur plusieurs axes stratégiques :
- L’amélioration qualitative de l’emploi doit devenir une priorité nationale, en complément de la création brute.
- Il est impératif de renforcer l’employabilité des jeunes et des femmes, qui demeurent les plus exposés aux formes d’emploi précaire.
- Les politiques RH doivent intégrer une approche territoriale différenciée, en tenant compte des réalités spécifiques au milieu rural.
- Enfin, la consolidation des emplois rémunérés et formels représente une condition essentielle pour garantir la soutenabilité du marché du travail.
Si les signaux de reprise sont bien là, ils restent fragiles. Le marché du travail marocain continue de souffrir d’un déséquilibre structurel entre quantité et qualité de l’emploi. Pour les DRH, cette période est propice à l’innovation sociale, à l’investissement dans les compétences, et à une relecture lucide des politiques d’inclusion et de performance durable.
Ci-après le texte intégral de la note du HCP : Consulter la note complète.