Une politique de stage sans cadre clair, c’est la porte ouverte aux dérives : tâches inadaptées, encadrement insuffisant, requalification juridique ou simple désengagement du stagiaire. En 2026, la charte des stages s’impose comme un document essentiel pour les grandes entreprises marocaines. Plus qu’un cadre administratif, elle formalise une promesse : garantir une expérience d’apprentissage cohérente, sécurisée et valorisante. Bien conçue, elle devient à la fois un outil de conformité légale, de pilotage RH et de marque employeur.
Pourquoi une charte des stages ?
- Garantir la qualité et la cohérence
Dans une grande entreprise, des dizaines de managers accueillent chaque année des stagiaires issus de filières différentes. Sans référentiel commun, la qualité de l’expérience varie considérablement. Certains bénéficient d’un accompagnement structuré ; d’autres se retrouvent livrés à eux-mêmes. La charte des stages établit des standards : durée minimale d’encadrement, modalités d’évaluation, attentes pédagogiques, communication interne. Elle uniformise le dispositif et garantit une expérience cohérente quel que soit le département ou le tuteur.
- Sécuriser juridiquement le dispositif
La frontière entre un stage et un emploi reste fragile. En l’absence de cadre, l’entreprise s’expose à un risque de requalification du stage en contrat de travail, notamment lorsque la mission remplace un poste permanent, excède la durée autorisée, ou ne présente aucun objectif pédagogique. Une charte claire, signée et appliquée, rappelle la nature du stage : un temps d’apprentissage en milieu professionnel, et non un emploi déguisé. Elle détaille la nature des tâches, la durée, les conditions d’encadrement et la grille d’évaluation, renforçant ainsi la conformité au droit du travail marocain.
- Valoriser la marque employeur
La charte est aussi un instrument de communication RH. Elle exprime les valeurs de l’entreprise, son engagement envers la jeunesse et son sens de la responsabilité sociale. Transmise dès la phase de recrutement, elle formalise une promesse : celle d’une expérience de stage respectueuse, formatrice et équitable. À l’ère des réseaux sociaux, une mauvaise expérience de stagiaire peut nuire durablement à la réputation d’une marque. Une charte claire prévient ce risque et transforme chaque PFE en opportunité de rayonnement.
Les dix piliers d’une charte de stage efficace
- Les objectifs pédagogiques
Le stage n’est pas un emploi, mais un dispositif d’apprentissage. La charte doit rappeler cette distinction et préciser les compétences visées. Chaque mission doit correspondre à un objectif pédagogique en lien avec la formation de l’étudiant. C’est cette logique qui distingue une expérience professionnalisante d’une simple exécution de tâches.
- La mission
Elle doit être claire, définie, mesurable et limitée dans le temps. Le descriptif de mission précise les livrables attendus, les outils utilisés et les compétences à acquérir. Une mission bien cadrée favorise la réussite du stage et facilite l’évaluation finale.
- Le tuteur
Véritable pivot du dispositif, le tuteur encadre, oriente et évalue. La charte fixe ses engagements : consacrer un temps minimum hebdomadaire au suivi, participer à la formation initiale des stagiaires et assurer un reporting régulier au service RH. Certaines entreprises prévoient une courte formation à la posture de tuteur pour garantir un accompagnement homogène.
- L’évaluation
La charte définit un cadre en trois étapes : entretien d’accueil, évaluation intermédiaire à mi-parcours, et entretien final. Elle précise la grille d’évaluation — acquisition de compétences, autonomie, rigueur, communication — et le format du feedback écrit. Ces jalons permettent d’assurer une progression continue et un suivi équitable.
- Le cadre de travail
Les horaires, les modalités de télétravail et les règles de présence doivent être définis dès le départ. Le travail hybride s’est imposé comme une nouvelle réalité, même pour les stagiaires. Clarifier les jours sur site, les outils collaboratifs et les critères d’éligibilité au télétravail prévient les incompréhensions.
- La rémunération et les avantages
L’indemnité de stage constitue un droit reconnu, mais la charte doit préciser l’ensemble du package : prise en charge du transport, bons repas, accès à la cantine, ou aides au logement. Ces éléments relèvent autant de l’équité que de la marque employeur.
- Santé et sécurité au travail
L’entreprise est tenue de garantir la sécurité du stagiaire dès le premier jour. La charte formalise l’obligation d’une sensibilisation à la sécurité, adaptée au poste et à l’environnement de travail. En milieu industriel ou technique, cette étape doit précéder toute prise de poste.
- Qualité de vie et inclusion
Le bien-être des stagiaires reflète la culture de l’entreprise. La charte peut inclure un engagement sur la diversité, la non-discrimination et l’accès aux programmes de QVT. Favoriser un environnement inclusif et bienveillant renforce la fidélisation et l’image positive auprès des écoles partenaires.
- Confidentialité et propriété intellectuelle
Les stagiaires manipulent souvent des données sensibles. La charte rappelle les règles de confidentialité, les droits de propriété intellectuelle sur les travaux réalisés, et les sanctions en cas de manquement. Cette clause protège l’entreprise tout en sensibilisant les jeunes à la déontologie professionnelle.
- L’offboarding
L’expérience ne s’arrête pas à la fin du stage. L’entretien de sortie, le rapport d’étonnement et l’attestation officielle font partie intégrante du dispositif. Le rapport d’étonnement, notamment, offre au DRH une source de feedback stratégique sur les pratiques internes et la culture d’entreprise.
Comment déployer la charte efficacement
Une charte n’a de valeur que si elle est appliquée. Sa diffusion doit être accompagnée d’un plan de déploiement clair : – Signature obligatoire par le tuteur, le manager et le stagiaire avant le démarrage du stage. – Formation rapide des encadrants pour en comprendre les enjeux. – Mise à disposition dans l’intranet RH et intégration dans le kit d’accueil stagiaire. – Suivi par les RH de la conformité à chaque étape du parcours.
Pour une grande entreprise, la charte des stages est bien plus qu’un document : c’est un levier de management transversal. Elle permet au DRH d’imposer un standard de qualité commun à toutes les entités, de contrôler la cohérence des pratiques et d’assurer une expérience homogène.
Le stage devient alors un produit RH à part entière — le « PFE-as-a-Product » — dont la charte constitue le cahier des charges. En définissant les rôles, les règles et les valeurs, elle transforme une obligation administrative en véritable outil de valorisation du capital humain.







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