D’après le World Economic Forum, 9 des 10 compétences clés pour 2025 relèvent du comportemental. Pourtant, peu d’entreprises disposent encore de grilles d’analyse robustes pour les évaluer en entretien.
Les soft skills : un enjeu stratégique de recrutement
L’automatisation croissante et l’IA générative bouleversent les priorités des directions RH. Si 40 % des compétences techniques actuelles seront dépassées d’ici 2027, selon une étude McKinsey, les compétences humaines restent difficilement remplaçables. Résilience, intelligence émotionnelle, pensée critique ou collaboration deviennent ainsi des piliers de la performance durable.
Dans les organisations marocaines, notamment dans les secteurs bancaire, industriel et technologique, cette mutation s’opère déjà. Plusieurs grands groupes ont intégré des modules d’évaluation comportementale dans leur processus de sélection, conscients que la compétence technique ne garantit ni la rétention ni l’engagement.
Identifier les soft skills clés du poste
Une erreur fréquente consiste à survaloriser des soft skills génériques, comme “la communication” ou “l’esprit d’équipe”, sans les relier au contexte réel du poste. Pour être actionnable, l’identification des soft skills doit partir des exigences opérationnelles spécifiques : pression temporelle, pilotage transverse, gestion d’incertitude ou relation client.
Prenons l’exemple d’un chef de projet IT en environnement agile. Ce profil devra démontrer une forte capacité d’adaptation, un sens politique affûté et une aisance dans la négociation entre directions métiers et DSI. À l’inverse, un auditeur interne devra combiner rigueur, discrétion, esprit critique et résistance à la pression. Le simple étiquetage de “soft skills” n’a donc de sens qu’ancré dans les réalités du poste.
Évaluer les soft skills en entretien : de la déclaration à la démonstration
L’entretien d’embauche reste l’étape la plus pertinente pour valider les compétences comportementales, à condition de dépasser les déclarations d’intention. L’enjeu est d’amener le candidat à contextualiser et objectiver ses propos. Voici trois méthodes efficaces :
- L’analyse d’expérience passée (méthode STAR) : demandez au candidat de décrire une situation professionnelle précise (Situation – Tâche – Action – Résultat) où il a mobilisé une compétence donnée. Cela permet d’évaluer la cohérence entre son discours et les résultats obtenus.
- La mise en situation simulée : exemple : un commercial peut être confronté à une objection client fictive. Le recruteur observe ici la réactivité, l’écoute active, l’assertivité et la capacité à convaincre.
- Le recoupement croisé : poser la même question sous différents angles à différents moments de l’entretien permet de vérifier la constance des réponses et de mieux cerner les traits comportementaux profonds.
Selon une étude de Deloitte, les candidats capables de contextualiser leurs soft skills augmentent de 30 % leurs chances de succès dans les processus de recrutement.
Soft skills : catalyseurs de compatibilité culturelle
Au-delà de l’adéquation au poste, les soft skills révèlent un autre levier stratégique : la compatibilité culturelle. Pour les entreprises marocaines en phase d’hypercroissance ou de transformation, le risque n’est plus seulement l’incompétence, mais l’inadéquation culturelle.
Un cadre dirigeant peut avoir toutes les compétences techniques requises, mais échouer s’il ne partage pas les valeurs implicites de l’entreprise : rapidité d’exécution, transparence, sens du collectif ou orientation client. L’entretien devient donc un outil de projection culturelle, où les soft skills jouent un rôle d’interface entre l’individu et l’organisation.
L’enjeu pour les RH : professionnaliser l’évaluation comportementale
Si les candidats doivent apprendre à illustrer leurs soft skills de manière authentique et contextualisée, la responsabilité incombe aussi aux recruteurs. Professionnaliser l’évaluation des soft skills nécessite de :
- Former les recruteurs à des grilles d’analyse comportementale ;
- Structurer les entretiens autour de compétences définies à l’avance ;
- S’appuyer sur des outils psychométriques fiables (tests de personnalité, évaluations situées) pour compléter l’observation directe.
À l’instar de grandes entreprises comme OCP, Attijariwafa bank ou Dell Maroc, plusieurs acteurs structurent désormais leur approche autour de référentiels de compétences comportementales internes, intégrés dans leur stratégie de développement des talents.
Les soft skills façonnent la capacité des talents à s’intégrer, collaborer, évoluer et impulser le changement. Savoir les évaluer avec rigueur n’est plus un atout : c’est une nécessité pour sécuriser les recrutements et construire la performance collective.







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