Une amélioration portée par les jeunes, les hommes et les zones rurales, mais encore marquée par la montée du sous-emploi et la fragilité de l’emploi féminin
Le marché du travail marocain retrouve un souffle. Selon les données publiées par le Haut-Commissariat au Plan (HCP), le taux de chômage national s’est établi à 13,1 % au troisième trimestre 2025, contre 13,6 % au trimestre précédent. Ce repli de 0,5 point traduit une amélioration simultanée des indicateurs en milieu urbain (–0,7 point) et en zones rurales (–0,5 point), ainsi qu’un reflux sensible du chômage chez les jeunes et les hommes.
Mais derrière ce signal encourageant, plusieurs défis demeurent : sous-emploi en hausse, chômage féminin en progression, et disparités régionales persistantes.
Une reprise progressive mais réelle de l’emploi
Le HCP fait état d’une création nette de plusieurs dizaines de milliers d’emplois sur un an, traduisant un retour partiel de la dynamique économique après deux années marquées par la prudence des entreprises.
Cette baisse du chômage reflète l’effet combiné de plusieurs facteurs :
- la stabilisation macroéconomique portée par la baisse de l’inflation et la reprise modérée de la consommation ;
- la relance des activités agricoles après une campagne céréalière moins déficitaire ;
- la reprise des services, notamment le tourisme, le commerce, le transport et l’offshoring ;
- et enfin, les programmes publics d’insertion professionnelle et de soutien à l’emploi des jeunes, notamment à travers les dispositifs Forsa et Awrach.
Le taux de chômage urbain est passé de 17 % à 16,3 %, et celui du milieu rural de 7,4 % à 6,9 %. Une tendance qui traduit un regain d’activité dans des secteurs comme la construction, les services logistiques ou l’agro-industrie.
Une amélioration visible chez les jeunes et les diplômés
Les jeunes de 15 à 24 ans, longtemps les plus touchés, enregistrent une baisse de leur taux de chômage de 39,5 % à 38,4 %, soit 1,1 point de moins.
Chez les hommes, la tendance est également positive, avec un taux en recul d’un point (de 11,6 % à 10,6 %).
Les diplômés profitent également de cette embellie : leur taux de chômage passe de 19,8 % à 19 %.
Ces chiffres traduisent les effets positifs de la digitalisation croissante de certains métiers, de la montée de l’entrepreneuriat individuel, et des politiques de soutien à la création de micro-entreprises. Les programmes de formation continue et de reconversion, encouragés par plusieurs branches professionnelles, contribuent également à élargir l’accès au marché du travail.
Une dynamique encore incomplète : le sous-emploi en hausse
Malgré la baisse du chômage, le sous-emploi s’aggrave. Le HCP indique que 1,2 million de Marocains sont désormais concernés, contre 1,07 million un an plus tôt.
Le taux national de sous-emploi atteint 11,1 %, contre 10 % en 2024. Cela signifie que de nombreux actifs occupent un emploi partiel, précaire ou sous-qualifié par rapport à leurs compétences.
Cette tendance pose un enjeu majeur pour les entreprises : comment transformer la reprise quantitative de l’emploi en création d’emplois stables, qualifiés et porteurs de valeur ?
Le paradoxe de l’emploi féminin
Si la situation s’améliore globalement, les femmes restent les grandes oubliées de cette reprise. Leur taux de chômage a légèrement augmenté, passant de 20,8 % à 21,6 %.
Cette évolution paradoxale s’explique par plusieurs facteurs :
- une participation féminine encore faible au marché du travail (autour de 22 %) ;
- une concentration des femmes dans des secteurs à faible résilience (textile, commerce informel, services domestiques) ;
- des freins culturels et logistiques persistants (mobilité, garde d’enfants, stéréotypes de genre).
L’amélioration durable du marché de l’emploi marocain passera nécessairement par une inclusion plus active des femmes, soutenue par des politiques publiques ciblées et des pratiques RH plus inclusives dans les entreprises.
Implications pour les directions RH
Pour les décideurs RH, ces évolutions appellent à une adaptation stratégique immédiate :
- Anticiper la tension sur les talents : la baisse du chômage signifie que les profils qualifiés deviennent plus rares. Les entreprises doivent investir dans leur marque employeur, leurs politiques de fidélisation et leurs programmes de mobilité interne.
- Répondre à la montée du sous-emploi : au-delà du recrutement, il s’agit de renforcer la montée en compétences, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et la formation continue.
- Renforcer la parité et l’inclusion : l’écart hommes/femmes sur le marché du travail reste une perte de potentiel économique. Les entreprises qui s’engagent dans la diversité et la flexibilité gagnent en performance et en image.
- Aligner RH et stratégie nationale : la réussite des programmes Awrach ou Forsa dépend aussi de l’implication du secteur privé. Les entreprises doivent s’y associer pour consolider un écosystème durable d’employabilité.
Le recul du chômage à 13,1 % est une bonne nouvelle macroéconomique, mais la qualité de l’emploi reste un défi majeur.
Le Maroc se trouve à un tournant : transformer la création d’emplois en une croissance inclusive et durable, fondée sur la qualification, l’égalité des chances et la modernisation des pratiques managériales.
La balle est désormais dans le camp des entreprises, des institutions et des DRH, appelés à faire de cette tendance une opportunité pour repenser leurs politiques de gestion des talents, de formation et d’inclusion.







![[INTERVIEW] Stage PFE : piloter la pyramide de talents chez Deloitte Maroc — Interview avec Mélanie BENALI et Hicham OUAZI l DRH.ma](https://drh-ma.s3.amazonaws.com/wp-content/uploads/2025/11/19103455/Interview-avec-Me%CC%81lanie-BENALI-et-Hicham-OUAZI.jpg)



