Givaudan, multinationale suisse de référence dans les arômes, les goûts, les fragrances et les produits de beauté, s’est implantée au Maroc depuis 2018 avec trois sites : deux unités commerciales et un site industriel à Nouaceur, acquis via Naturex. Le groupe, reconnu mondialement pour sa présence dans un produit sur quatre consommé au quotidien – du café aux biscuits, en passant par les produits d’hygiène ou les parfums – emploie environ 250 collaborateurs au Maroc.
Les métiers y sont variés : production, qualité, process, supply chain ou EHS au sein du site industriel ; R&D, création olfactive, évaluation, marketing ou sales dans les centres commerciaux. La démographie interne est contrastée : une population plus âgée du côté industriel, et plus jeune du côté commercial. La parité, elle, varie selon les activités : encore masculine en production sur le site de Naturex , mais composée à 90 % de femmes sur les deux sites commerciaux des arômes et des parfums .
À travers cette interview, Siham ARROUT partage la manière dont Givaudan transforme progressivement le stage de fin d’études (PFE) et les parcours apprentis en un véritable levier stratégique de recrutement, de renouvellement des compétences et de valorisation de la marque employeur.
Comment s’organise aujourd’hui la politique d’accueil des jeunes au sein de Givaudan, notamment à travers Naturex ?
Siham ARROUT : Notre politique d’accueil des jeunes s’articule autour de deux volets distincts. D’un côté, il y a les apprentis et techniciens issus des instituts spécialisés, principalement dans les métiers de l’agroalimentaire.
Depuis mon arrivée, nous avons recruté environ 20 personnes par ce biais : ce sont souvent de jeunes diplômés que nous formons, qui démarrent en contrat ANAPEC et que nous transformons ensuite en CDI. Ces recrutements répondent à deux logiques : le remplacement des départs à la retraite et l’augmentation de la charge liée aux transferts d’activité de l’étranger vers notre site marocain.
De l’autre côté, il y a les stages PFE, qui s’inscrivent plus dans une logique de détection de potentiels et d’intégration progressive dans les métiers clés. Nous avons récemment recruté une ingénieure process qui avait effectué son PFE chez nous. Ce type de parcours est précieux, car il permet à la personne de comprendre notre environnement industriel certifié (FSSC 22000, ISO, etc.) et d’évoluer rapidement après son stage.
Dans les deux cas, nous fonctionnons avec une logique de vivier : nous suivons les jeunes, nous les formons, nous les observons dans la durée. Et lorsque le besoin se présente, ils deviennent naturellement les premiers candidats considérés.
Disposez-vous d’un processus structuré pour cadrer la demande de stages PFE et garantir la qualité des missions confiées ?
Siham ARROUT : Oui, le processus est très clair. Nous refusons catégoriquement d’accueillir des stagiaires qui n’auraient pas de mission définie. Chaque demande doit provenir d’un manager ou d’un tuteur, avec un besoin explicitement formulé : la problématique, les compétences recherchées, et la valeur ajoutée attendue. Cela permet d’éviter les demandes « de courtoisie » — un cousin, une connaissance — qui n’apportent rien ni au stagiaire ni à l’entreprise.
Une fois le besoin validé, le service RH se charge de rechercher les profils adéquats. Nous menons des entretiens croisés : RH et tuteur. Si la candidature est retenue, nous intégrons le stagiaire via un parcours parfaitement balisé : formation EHS obligatoire, formation qualité et food safety, remise des EPI si besoin, accueil par les RH et tuteurs du stagière
Pendant le stage, nous assurons un suivi régulier, notamment pour les stages de 4 à 6 mois : échanges avec le stagiaire, point d’avancement, accompagnement sur le rapport de stage. En fin de parcours, nous effectuons une évaluation complète et nous vérifions que le rapport ne contient aucune information confidentielle. C’est un cadre strict, mais nécessaire dans notre environnement industriel.
Comment préparez-vous les besoins futurs en compétences, notamment face aux départs à la retraite et aux métiers en tension ?
Siham ARROUT : La planification est devenue essentielle. Sur le site industriel Naturex, nous faisons face à une réalité : de nombreux collaborateurs expérimentés partent en retraite. Nous avons donc choisi une stratégie basée sur l’anticipation et le transfert de compétences.
Nous collaborons étroitement avec les instituts, notamment les établissements agroalimentaires, avec lesquels nous avons participé à des salons et organisé des campagnes de recrutement. Ces jeunes sont formés en interne, plongés dans notre environnement certifié et accompagnés jusqu’à leur montée en compétences.
Dans nos métiers plus rares — aromaticiens, créateurs ou évaluateurs de parfums, profils R&D — le Maroc ne dispose pas encore d’un bassin suffisant. Nous avons dû recruter des talents venant de Dubaï, France ou Angleterre. Mais à terme, l’objectif est d’alimenter un vivier marocain : pour cela, les stages PFE constituent une voie d’entrée stratégique.
Quels critères privilégiez-vous pour sélectionner les écoles et institutions partenaires ?
Siham ARROUT : Notre logique est simple : rechercher des candidats dont la formation est réellement alignée avec nos métiers. Pour l’activité industrielle — extraction végétale, chimie, process — nous ciblons principalement les écoles d’ingénieurs en chimie, agroalimentaire ou biotechnologie.
Les instituts forment également un excellent vivier pour les techniciens. Nous avons eu de très bons éléments issus des formations agro. Ce qui compte, c’est la maîtrise du métier et la capacité à évoluer dans un environnement certifié et exigeant.
Pour les métiers transverses (logistique, RH, finance, marketing), nous privilégions les écoles reconnues et réputées pour la qualité de leur formation.
Enfin, nous attachons beaucoup d’importance à la motivation individuelle. Les jeunes qui sollicitent spontanément les RH sur LinkedIn, qui font preuve de curiosité, de courage et d’envie, ont souvent plus de chances d’intégrer nos équipes. Je conseille d’ailleurs aux jeunes de ne jamais attendre qu’un proche leur trouve un stage, mais de chercher eux-mêmes, activement.
Comment assurez-vous une intégration réussie dans un environnement industriel exigeant et certifié ?
Siham ARROUT : L’intégration est un levier central. Nous gérons une usine avec des zones ATEX où certains comportements — comme l’usage du téléphone portable peuvent représenter un danger réel. C’est pourquoi aucune intégration n’est possible sans un parcours strict.
Dès l’arrivée, les stagiaires suivent une formation EHS obligatoire et une formation qualité/food safety pour comprendre nos certifications (FSSC 22000, ISO…). Nous leur remettons les EPI nécessaires et leur présentons les règles de sécurité.
Ensuite, le rôle du tuteur est déterminant : c’est lui qui accompagne, explique, supervise, et s’assure de la bonne exécution de la mission. Un tour d’usine et des rencontres avec les équipes complètent l’accueil.
Nous faisons également un point régulier avec les RH pour vérifier la progression, lever les difficultés, préparer le rapport de stage et identifier les perspectives éventuelles d’intégration. Beaucoup de stagiaires nous remercient pour l’accompagnement personnalisé : ils se sentent intégrés comme des collaborateurs à part entière, et c’est exactement l’objectif.
Comment conciliez-vous les attentes de la génération Z avec les exigences d’un environnement industriel structuré ?
Siham ARROUT : C’est un défi quotidien, mais nous avons beaucoup progressé. La génération Z attend de la flexibilité, du sens, et une relation managériale plus horizontale. Le modèle industriel, lui, repose sur des process, des certifications, des horaires fixes. Nous avons donc travaillé sur la cohabitation des générations.
Nous avons organisé plusieurs formations pour nos managers sur la compréhension des besoins des jeunes générations : flexibilité horaire, feedback plus fréquent, contextualisation des missions, autonomie progressive. Cette sensibilisation a été très utile : nos managers sont aujourd’hui mieux outillés pour gérer cette nouvelle population.
En parallèle, nous veillons à ce que les missions des stagiaires aient du sens : pas de tâches de « saisie », pas de stage vide. Ils doivent apprendre, progresser, contribuer. Un stagiaire bien accompagné devient un ambassadeur de notre marque employeur.
La clé, c’est un management ferme sur les règles, notamment de sécurité, mais souple sur la manière d’accompagner et de responsabiliser.
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