Le gouvernement espagnol a décidé de réduire la durée légale maximale du travail hebdomadaire de 40 à 37,5 heures, une mesure qui sera applicable d’ici la fin de l’année 2025. Cette modification constitue la première révision officielle de la durée légale du travail depuis 1983. Environ 12,5 millions de salariés seront concernés, dont 10,5 millions à temps plein et 2 millions à temps partiel, sans diminution de leur rémunération. Cette réduction équivaut à une baisse d’environ 2,5 heures par semaine, soit près de 48 minutes de travail en moins chaque semaine.
Les secteurs les plus impactés sont le commerce, l’industrie manufacturière, la construction ainsi que l’hôtellerie-restauration, ce dernier ayant enregistré une croissance importante de ses marges ces dernières années. Géographiquement, les régions où la réforme touchera le plus grand nombre de travailleurs sont la Catalogne, Madrid et l’Andalousie, qui concentrent plus de six millions de salariés concernés.
Cette réforme s’inscrit dans un contexte où la productivité par travailleur en Espagne a augmenté de 53 % depuis 1983, alors que la rémunération réelle n’a progressé que de 22 %. Le gouvernement justifie donc cette réduction comme un moyen d’améliorer la qualité de vie des salariés, en leur offrant plus de temps libre sans impact sur leur salaire. Par ailleurs, des mesures complémentaires renforcent le contrôle du temps de travail et garantissent le droit à la déconnexion numérique, afin d’éviter les heures supplémentaires non déclarées.
Les syndicats ont majoritairement soutenu cette réforme, soulignant son importance pour l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. En revanche, les organisations patronales ont exprimé des réserves, craignant des coûts supplémentaires pour les entreprises, notamment dans les secteurs avec des marges plus faibles. Le gouvernement a engagé un dialogue social pour accompagner la mise en œuvre de cette réforme et limiter les impacts économiques négatifs.
En comparaison, la France applique une durée légale du travail plus courte, fixée à 35 heures par semaine pour les salariés à temps plein. Selon les données de l’Insee, la durée habituelle hebdomadaire de travail des salariés à temps complet en France était de 38,9 heures en 2023, avec une durée annuelle effective moyenne de 1 669 heures. Cette durée est inférieure à la moyenne européenne qui s’établit autour de 1 792 heures annuelles. Les cadres français travaillent en moyenne 42,1 heures par semaine, soit plus que la moyenne nationale, tandis que les autres catégories oscillent entre 37,3 et 38,2 heures. Le secteur tertiaire marchand affiche une durée annuelle effective plus élevée, notamment dans les services immobiliers et l’hébergement-restauration.
Au Maroc, la durée légale du travail est plus élevée que celle de l’Espagne et de la France. Le Code du travail marocain fixe la durée maximale à 44 heures par semaine pour les employés et 48 heures pour les ouvriers, soit entre 2 288 et 2 496 heures annuelles selon les secteurs. Cette durée est encadrée par des limites journalières, avec un maximum de 10 heures de travail par jour. Le repos hebdomadaire minimum est d’une journée complète, généralement fixée entre le vendredi et le dimanche. Les heures supplémentaires sont autorisées sous conditions strictes, avec l’accord écrit du salarié et une rémunération majorée.
La différence notable entre ces pays illustre les disparités dans l’organisation du travail. En France, la réduction du temps de travail a été mise en œuvre pour favoriser l’emploi et améliorer la qualité de vie, avec des dispositifs comme les RTT (réduction du temps de travail) et des forfaits jours pour certains cadres. En Espagne, la réduction à 37,5 heures s’inscrit dans une volonté de rattraper un retard en matière de conditions de travail, tout en tenant compte des réalités économiques. Au Maroc, la durée plus longue reflète des besoins spécifiques liés à la structure économique et à la réglementation en vigueur, mais pose également la question de l’équilibre entre productivité et bien-être des salariés.
La réforme espagnole pourrait servir de modèle pour le Maroc, notamment en matière d’adaptation progressive de la durée légale du travail, combinée à des mesures sociales pour protéger les salariés. La réduction du temps de travail, associée à un renforcement des droits sociaux, peut contribuer à une meilleure productivité et à une plus grande satisfaction au travail, deux enjeux cruciaux pour les économies en développement.