L’entreprise se distingue par une forte culture de fidélisation, affichant une ancienneté moyenne impressionnante de 13 à 15 ans. La répartition actuelle des effectifs révèle une population mixte, avec une féminisation notable de l’encadrement — parité au niveau du CODIR — malgré la nature de l’industrie lourde. SEVAM, aujourd’hui multinationale au sein du Groupe Castel, est en pleine dynamique de rajeunissement, la moyenne d’âge étant passée de 46 à environ 40 ans, accueillant ainsi massivement la Génération Z, un enjeu majeur pour les Ressources Humaines.
Dans ce contexte de croissance et de renouvellement des générations, la politique de stage de SEVAM est considérée, non pas comme un simple complément, mais comme un actif stratégique essentiel pour l’identification et le développement des futurs talents de l’entreprise.
Comment la politique de stage s’intègre-t-elle à votre stratégie globale de Gestion des Compétences ?
Angelique ABOULIATIM : Notre approche en matière de stages est fondamentalement ancrée dans notre politique de Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC). Chez SEVAM, nous avons fait le choix stratégique et audacieux de privilégier la mobilité interne plutôt que le recrutement externe systématique. Nous sommes convaincus que les compétences nécessaires à notre évolution se trouvent déjà, ou peuvent être cultivées, au sein de l’entreprise. C’est dans cette optique que nous avons érigé le programme PFE en véritable vivier de compétences.
Pour nous, il ne s’agit pas de pourvoir des postes subalternes, mais d’attirer des jeunes diplômés sur des sujets à fort impact stratégique et opérationnel. Chaque PFE est défini autour d’une problématique concrète nécessitant un retour sur investissement mesurable. Nous bannissons les stages “photocopieuse” et exigeons de réels livrables. En intégrant ces futurs talents, nous gérons proactivement le renouvellement de nos équipes tout en nous assurant qu’ils soient formés aux standards élevés de notre culture d’entreprise.
Les stagiaires PFE, tout comme les stagiaires OFPPT sur la partie technique, représentent une pépinière exceptionnelle. Nous leur offrons le même parcours d’intégration complet qu’un collaborateur, car il s’agit pour nous d’un recrutement en puissance. Cela nous permet de tester leurs compétences techniques, mais surtout leurs compétences comportementales et leur adhésion à nos valeurs. L’objectif est clair : former, fidéliser et anticiper nos besoins futurs.
Comment organisez-vous le recensement des besoins en stages et l’articulation entre la RH et les équipes opérationnelles ?
Angelique ABOULIATIM : La clé de la réussite de notre campagne de stage réside dans un processus de recrutement rigoureux, similaire à celui d’une embauche standard, qui démarre par un recensement des besoins méticuleux. Cette démarche est bidirectionnelle.
D’une part, nous avons les besoins qui émanent naturellement de l’exploitation et des directions métiers ou support. Proches des équipes au quotidien, nous identifions les problématiques courantes ou les projets d’amélioration nécessitant une expertise extérieure. Ces besoins sont formalisés dès novembre/décembre pour les PFE.
D’autre part, la Direction des Ressources Humaines initie une démarche proactive en s’appuyant sur notre plan de recrutement annuel. Si nous prévoyons des besoins pour certains profils spécifiques, nous sollicitons les équipes pour concevoir un sujet de stage “sur mesure” permettant d’évaluer le candidat sur le poste visé. Notre troisième unité de production sur le site de Tit Melil en est un exemple probant, avec un taux de conversion de 100 % grâce à des stages OFPPT alternés, ou stage de fin d’études
L’équipe RH agit comme interface et catalyseur en orientant les demandes et en les alignant sur notre stratégie. Nous définissons des mini-fiches de poste pour garantir que chaque sujet soit un véritable tremplin vers une carrière chez SEVAM.
Pourquoi un volume maîtrisé d’une vingtaine de stagiaires PFE ?
Angelique ABOULIATIM : Effectivement, nous prenons une vingtaine de stagiaires PFE, et une vingtaine pour les stages OFPPT. Cette décision est une composante essentielle de notre engagement pour la qualité. Si nous prenions cent stagiaires, nous n’aurions pas la capacité d’encadrement nécessaire pour garantir un suivi rigoureux.
Nous privilégions la qualité de l’accompagnement à la quantité. Pour chaque stagiaire PFE, nous mettons en place un dispositif d’encadrement structuré intégrant plusieurs niveaux de suivi. Le tuteur direct est responsable de l’avancement technique du projet et assure un accompagnement opérationnel quotidien. Le parrain de stage issu de l’exploitation, souvent du département Process, apporte un regard transversal sur la compréhension des enjeux industriels. En parallèle, le parrain de stage côté RH garantit la cohérence du parcours, le respect des valeurs de l’entreprise et l’accompagnement logistique. Ce dispositif crée un encadrement complet et cohérent qui permet à chaque stagiaire de progresser dans de bonnes conditions.
Le suivi RH est hebdomadaire, permettant d’intervenir rapidement en cas de difficulté. Ce travail intensif assure un taux de conversion élevé des stages en embauches.
Quel est le taux de conversion moyen en CDI, et comment ce modèle impacte-t-il le turnover et la rétention ?
Angelique ABOULIATIM : Notre modèle de stage est un processus de pré-embauche structuré. Historiquement, notre taux de conversion des stages PFE en recrutement se situe autour de 30 %, et pour les stages OFPPT entre 50 et 60 %. Lors de notre récent projet d’extension, nous avons même atteint 100 % sur les profils identifiés comme recrues potentielles.
L’impact sur la rétention est significatif. SEVAM bénéficie d’un faible turnover grâce à une forte culture d’entreprise. Les collaborateurs issus de notre vivier de stagiaires montrent une fidélité encore plus forte, car nous avons pu évaluer leur comportemental, leur alignement aux valeurs et leur potentiel sur une période de 4 à 6 mois.
L’intégration est facilitée : ils ne sont pas perçus comme des concurrents, et les responsables opérationnels les connaissent déjà. Le risque d’erreur de recrutement est considérablement réduit.
Comment gérez-vous l’intégration de la Génération Z et les éventuels conflits intergénérationnels ?
Angelique ABOULIATIM : L’arrivée de la Gen Z est un formidable accélérateur de changement. Ils apportent une énergie et une franchise qui nous obligent à revisiter nos modes de fonctionnement. Les conflits sont paradoxalement plus marqués avec les trentenaires et quadragénaires qu’avec les collaborateurs les plus expérimentés.
Notre stratégie repose sur l’ultra-communication. Nous misons sur la simplicité et le cadrage, grâce au rôle clé du Chargé des PEC (Point d’Entrée Collaborateur), responsable de l’accueil, du guidage administratif et de la transmission des règles de fonctionnement dès l’arrivée des jeunes. Ce rôle permet une intégration structurée et un accès direct à un interlocuteur référent. Les managers sont également soutenus par un dispositif d’accompagnement incluant un suivi hebdomadaire formel, des retours réguliers et une aide pour comprendre les codes spécifiques de cette génération. Enfin, nous introduisons davantage de souplesse dans la gestion des horaires et des récupérations, tout en explicitant les contraintes industrielles qui encadrent cette flexibilité. La Gen Z nous pousse à être plus clairs, plus transparents et plus adaptatifs, ce qui constitue une opportunité de modernisation continue.
Quelles mesures spécifiques sont mises en place pour que les stagiaires adhèrent aux valeurs d’engagement de l’industrie lourde (24/7) ?
Angelique ABOULIATIM : L’adhésion aux exigences opérationnelles d’une industrie lourde repose avant tout sur un onboarding structuré. Les stagiaires suivent un parcours d’intégration complet incluant des modules obligatoires sur la sécurité, les règles de fonctionnement d’un site industriel et les principes d’éthique professionnelle. L’objectif est de leur permettre de comprendre la réalité d’un environnement 24/7 et le niveau de fiabilité attendu dans ce type d’activité.
Nous mettons également l’accent sur la pédagogie managériale. Les tuteurs et parrains expliquent de manière concrète les contraintes liées à la continuité de production, tout en accompagnant les stagiaires pour organiser leur charge de travail, anticiper leurs échéances et adopter les bons réflexes. Cette approche vise à créer une culture de responsabilité progressive, adaptée à des profils en début de parcours.
Enfin, l’engagement n’est jamais imposé de manière unilatérale. Nous valorisons les efforts fournis lorsqu’ils dépassent le cadre habituel, notamment en accordant de la souplesse sur les horaires ou des récupérations. Cette transparence et cette équité contribuent à instaurer une relation de confiance, facilitant l’intégration durable des stagiaires dans un environnement exigeant.
Comment mesurez-vous l’efficacité de votre politique de stage et quel rôle jouent le SIRH et les indicateurs ?
Angelique ABOULIATIM : L’efficacité de notre politique de stage est pilotée par des indicateurs RH clairs. Les stagiaires sont intégrés dans notre SIRH, qui centralise le type de stage, le domaine d’intervention, les évaluations détaillées en fin de stage et le potentiel de recrutement. Nous distinguons les stages standard des stages de pré-embauche, avec un taux de conversion d’au moins 80 % sur ces derniers.
Cette CVthèque interne nous permet de répondre rapidement aux besoins de recrutement, en nous appuyant sur des profils déjà évalués, acculturés et immédiatement opérationnels.
Comment avez-vous convaincu la direction de l’intérêt de prendre des stagiaires dans une industrie lourde ?
Angelique ABOULIATIM : J’ai présenté la politique stagiaire comme un levier de gestion des compétences, et non comme une démarche administrative. Dans une industrie lourde, chaque recrutement implique un temps d’adaptation important aux process, aux équipes, aux contraintes de sécurité et aux rythmes de production. Les stages PFE et l’alternance permettent d’intégrer progressivement les jeunes, de les tester dans un cadre réel et de mesurer leur capacité à évoluer dans un environnement exigeant avant toute embauche.
La direction a été convaincue lorsque nous avons démontré que ce modèle réduit fortement le risque d’erreur de recrutement. Accueillir un stagiaire sur plusieurs mois, l’observer en situation et le faire accompagner par un tuteur et un parrain offre une visibilité que ne donne jamais un entretien classique. Cette période d’immersion permet aussi d’évaluer la compatibilité culturelle, la capacité à respecter les règles de sécurité, la réactivité face aux imprévus et la façon de fonctionner en équipe.
J’ai également insisté sur l’impact financier. Recruter via un stage PFE ou une alternance coûte nettement moins cher, car l’essentiel de la formation aux métiers de l’entreprise est réalisé pendant la période de stage. L’acclimatation aux outils, aux procédés industriels et à la culture interne est déjà faite au moment de l’embauche. Cela réduit considérablement le coût habituel de montée en compétences, qui peut être élevé dans une industrie à forte technicité.
Enfin, le taux d’intégration élevé des stagiaires — que nous suivons jusqu’au recrutement — a renforcé l’idée que cette approche constitue l’un des viviers de talents les plus fiables pour soutenir la croissance de l’entreprise.
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