Le stage de fin d’études occupe une place stratégique dans les grandes entreprises marocaines. Il constitue l’un des premiers points de contact structurants entre les jeunes diplômés et les organisations, un moment décisif où se bâtissent les premières perceptions sur la culture, la performance attendue et les opportunités d’évolution. Pourtant, les résultats de l’enquête nationale 2025 montrent que les entreprises ne tirent pas pleinement parti de ce levier. Malgré une intention affichée d’en faire un instrument de pré-recrutement et d’attraction, la réalité opérationnelle fait apparaître des pratiques fragmentées, des manques d’outillage et des processus inachevés. Ce décalage fragilise l’expérience des stagiaires, complique la tâche des managers et réduit la capacité des DRH à structurer une politique de gestion des talents à la hauteur des enjeux.
Des politiques de stage encore insuffisamment formalisées
La première faiblesse mise en lumière par l’étude réside dans l’absence de cadre institutionnel suffisamment clair. Seules 24 % des grandes entreprises interrogées disposent d’une politique de stage formalisée et actualisée, laissant une majorité d’organisations fonctionner avec des dispositifs soit partiellement actualisés, soit entièrement informels. Ce déficit de formalisation engendre des disparités notables dans les pratiques internes et expose les entreprises à des fluctuations de qualité selon les sites, les filiales ou les managers impliqués. L’hétérogénéité des règles d’accueil, du suivi pédagogique ou de la validation des missions crée des zones de flou qui compliquent la prise en main du dispositif par les équipes opérationnelles.
À cette fragilité s’ajoute une absence notable de conventions-cadres avec les écoles. Près de 83 % des DRH déclarent ne pas disposer de partenariat structuré avec les établissements d’enseignement supérieur, un manque qui limite la capacité à harmoniser les attentes, à clarifier les responsabilités et à gérer les situations sensibles. L’absence de dialogue institutionnel régulier empêche également d’adapter les dispositifs aux évolutions des référentiels académiques, alors que les besoins des entreprises se transforment rapidement. Le stage perd ainsi une partie de son rôle de passerelle structurée entre monde académique et monde professionnel.
Un levier de pré-recrutement fort, mais sous-encadré
L’étude confirme que les entreprises attribuent au stage PFE une fonction prioritaire : préparer le recrutement de futurs talents. Près de 46 % des DRH citent cette finalité comme la raison principale de leur dispositif. Ce positionnement stratégique s’explique par la volonté d’identifier les profils à potentiel avant leur insertion définitive sur le marché, de réduire les coûts d’acquisition et de diminuer les risques liés au recrutement externe. Les entreprises voient également dans les stages une opportunité d’intégrer plus tôt les jeunes collaborateurs à la culture interne, tout en testant leur capacité d’adaptation, leur engagement et leur autonomie.
Cependant, cette ambition se heurte à des limites opérationnelles. La validation des missions de stage reste largement informelle pour 56 % des entreprises, et seuls 38 % des DRH s’appuient sur un processus RH structuré pour garantir la cohérence des missions proposées. Ce déficit de cadrage se traduit par une qualité inégale des missions confiées, parfois mal alignées avec les besoins pédagogiques des écoles ou les compétences réellement attendues par l’entreprise. Sur le plan pédagogique, la coordination est quasi inexistante : 89 % des DRH ne valident jamais ou rarement les objectifs éducatifs avec les écoles, ce qui accentue l’écart entre attentes académiques et exigences opérationnelles.
La formation des tuteurs constitue un autre point de fragilité. Dans 71 % des cas, aucun programme structuré n’est mis en place pour accompagner les responsables directs des stagiaires. Le rôle de tuteur, pourtant central pour garantir une expérience d’apprentissage solide, repose essentiellement sur des initiatives individuelles, sans support méthodologique partagé. Cette situation nuit à la qualité du mentorat et limite la capacité de l’entreprise à transmettre ses compétences clés ou à détecter le potentiel des jeunes talents.
Un déploiement opérationnel marqué par l’absence d’outillage structurant
Au-delà de la gouvernance et de l’ingénierie, le déploiement quotidien des stages révèle d’importantes lacunes. Le processus d’onboarding reste largement informel : seules 25 % des entreprises disposent d’un accueil structuré intégrant présentation des usages de l’entreprise, sécurité, culture et aspects RH essentiels. Dans la majorité des organisations, l’intégration dépend fortement des pratiques locales, ce qui entraîne des expériences contrastées pour les stagiaires. Cette variabilité fragilise le sentiment d’appartenance, retarde la montée en compétence et peut générer un manque de repères dès les premiers jours.
La question du suivi illustre également un retard important. 69 % des entreprises n’utilisent pas d’outil de suivi intégré, et s’appuient sur des pratiques manuelles, souvent non centralisées. Les DRH perdent ainsi en capacité d’analyse, en visibilité sur les trajectoires et en réactivité pour corriger les difficultés rencontrées. Dans un marché où l’anticipation des besoins en compétences devient déterminante, l’absence de données consolidées prive les organisations de leviers essentiels pour optimiser leur stratégie de gestion des talents.
La diffusion des offres de stage montre toutefois une organisation plus mature. L’usage de jobboards spécialisés, notamment Stagiaires.ma, et des réseaux sociaux est bien ancré, permettant de toucher un vivier large et diversifié. Les entreprises restent néanmoins insuffisamment actives dans le développement de partenariats structurés avec les écoles et dans l’utilisation de leurs sites carrières, limitant ainsi leur capacité à renforcer leur attractivité auprès des meilleurs profils.
Une capitalisation encore trop faible pour nourrir le vivier de talents
Les résultats de l’étude soulignent un autre enjeu majeur : la difficulté à capitaliser sur les expériences de stage pour bâtir un vivier durable de jeunes talents. Seules 17 % des entreprises disposent d’une base structurée intégrée dans un SIRH ou un ATS, capable de suivre les anciens stagiaires, de documenter leurs performances ou de leur proposer de nouvelles opportunités. Pour la majorité, la gestion post-stage reste informelle, reposant sur des fichiers internes souvent incomplets ou sur la mémoire des managers. Ce manque de systématisation empêche une exploitation efficace du potentiel offert par les stagiaires, notamment pour des besoins futurs de recrutement.
L’évaluation constitue une autre faiblesse. 82 % des entreprises ne réalisent aucune enquête de satisfaction à la fin des stages, que ce soit auprès des stagiaires ou des tuteurs. Cette absence de retour structuré prive les DRH d’indicateurs essentiels pour améliorer l’expérience, ajuster les pratiques et identifier les bonnes pratiques locales. De même, le taux de conversion des stages en emploi reste bas : dans 51 % des grandes entreprises, moins de 10 % des stagiaires décrochent un CDI ou un CDD. Le potentiel du PFE comme accélérateur d’intégration reste donc très en deçà de ce qu’il pourrait offrir.
Les freins identifiés par les DRH sont multiples : faible implication des écoles, difficultés de sourcing ou de disponibilité des managers, manque d’outils et cadre administratif jugé lourd. Ces facteurs fragmentent encore davantage le dispositif et limitent sa capacité à s’inscrire dans une véritable stratégie de développement des compétences.
Le diagnostic posé par cette enquête nationale met en évidence une réalité claire : le stage PFE, malgré son importance reconnue, n’est pas encore traité comme un levier structurant de gestion des talents dans les grandes entreprises marocaines. Les organisations qui parviendront à formaliser leurs processus, à digitaliser leurs outils, à renforcer leurs partenariats académiques et à institutionnaliser la capitalisation des retours d’expérience disposeront d’un avantage certain pour attirer et fidéliser les jeunes talents. Le potentiel existe, les ambitions aussi ; ce sont désormais les capacités de structuration, de pilotage et de coordination qui détermineront la valeur réelle du dispositif.</p
Consultez l’étude complète ci-après :
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