Pour la première fois, le Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG) franchira le seuil symbolique des 3 000 dirhams mensuels au Maroc. Cette revalorisation, inscrite dans l’accord social historique du 29 avril 2024 et traduite dans le décret n° 2.24.1122 adopté par le Conseil du gouvernement le 26 décembre 2024, marque une étape majeure dans l’amélioration des conditions salariales pour les travailleurs des secteurs de l’industrie, du commerce et des professions libérales.
Conformément à cet accord, le SMIG net atteindra 3 045,96 dirhams à compter du 1er janvier 2025, soit une hausse d’environ 5 % par rapport à la précédente revalorisation. Parallèlement, le salaire minimum horaire sera porté à 17,10 dirhams dans les secteurs non agricoles.
Le Salaire Minimum Agricole Garanti (SMAG) bénéficiera également d’une augmentation. À partir du 1er avril 2025, les travailleurs agricoles percevront un salaire mensuel net de 2 255,03 dirhams, soit 93 dirhams par jour. Cette mesure, qui s’inscrit dans la continuité de la politique de réduction des disparités salariales, représente une augmentation totale de près de 20 % du SMAG entre 2021 et 2025.
Si ces hausses constituent un progrès significatif pour le pouvoir d’achat des salariés, elles suscitent toutefois des interrogations quant à leur impact sur la compétitivité de certains secteurs, notamment ceux déjà fragilisés par des dettes sociales et fiscales (comme le textile et l’agroalimentaire). Le surcoût lié aux charges sociales et à l’augmentation globale de la masse salariale pourrait, selon certains experts, peser sur les entreprises les moins solvables et entraîner d’éventuelles suppressions de postes.
De son côté, le gouvernement, par la voix de son porte-parole Mustapha Baitas, insiste sur le fait que ces revalorisations s’inscrivent dans une volonté de renforcer la justice sociale et de préserver le pouvoir d’achat des citoyens. Un budget de 45 milliards de dirhams est d’ailleurs prévu d’ici 2026 pour soutenir la valorisation des salaires, illustrant l’ambition d’un dialogue social pérenne et constructif.
Néanmoins, l’Union Marocaine du Travail (UMT) et d’autres syndicats continuent de plaider pour un salaire minimum encore plus élevé, arguant que le niveau de vie et les charges des ménages marocains justifieraient un relèvement plus conséquent. La question se pose donc de savoir si cette mesure parviendra à concilier, dans la durée, la nécessaire justice sociale avec les contraintes de compétitivité économique auxquelles font face les entreprises.
Quoi qu’il en soit, ces augmentations traduisent une avancée notable vers l’harmonisation des conditions salariales entre les secteurs et témoignent d’un dialogue social plus ouvert. Elles répondent à une demande syndicale de longue date et reflètent la volonté des pouvoirs publics de réduire les inégalités, tout en veillant à la préservation de l’emploi dans un contexte économique encore marqué par de nombreuses incertitudes.