Selon une méta-analyse publiée par The Lancet en 2022, les troubles mentaux coûtent chaque année à l’économie mondiale près de 1 000 milliards de dollars en perte de productivité. Au Maroc, les arrêts de travail liés à la santé mentale sont en forte hausse, selon les chiffres officieux de plusieurs organismes mutualistes. Pour les DRH, l’enjeu n’est plus de “sensibiliser”, mais de transformer les recommandations de l’OMS en véritables leviers de performance organisationnelle.
Intervenir à la racine : adapter l’organisation du travail
La première urgence, selon l’OMS, est d’agir sur les causes structurelles. Les interventions organisationnelles doivent viser à réduire les facteurs de risque psychosociaux : surcharge de travail, manque d’autonomie, absence de reconnaissance, flou des responsabilités.
Dans les environnements à forte pression – hôpitaux, services d’urgence, centres d’appel – la détresse psychologique est encore plus marquée. L’OMS préconise ici des actions ciblées : ajustement des horaires, soutien managérial renforcé, et révision des objectifs pour éviter la sur-sollicitation.
Au Maroc, certains employeurs du secteur de la santé commencent à intégrer ces pratiques. Une clinique privée de Rabat a ainsi réduit les horaires de nuit à 10 heures maximum, tout en instaurant des cellules d’écoute hebdomadaires.
Former les managers : un levier encore sous-exploité
La formation des encadrants est l’axe le plus rentable – et souvent le plus négligé. L’OMS recommande des modules ciblés pour leur apprendre à reconnaître les signaux faibles, accompagner les collaborateurs en détresse et rompre avec les réflexes de stigmatisation.
Une étude menée en 2023 par Deloitte sur 2 500 salariés en Afrique du Nord révèle que 64% des collaborateurs hésitent à parler de leur mal-être à leur hiérarchie, par peur d’être perçus comme “faibles”. Or, un manager formé peut désamorcer des situations critiques en amont, éviter des départs prématurés, et renforcer l’engagement de son équipe.
Adapter les postes pour inclure sans exclure
Dans les cas où un trouble mental est avéré, la législation marocaine permet déjà certains aménagements raisonnables, même si leur application reste marginale. Ces ajustements peuvent inclure la flexibilité des horaires, le télétravail ponctuel, ou un réaménagement du poste sans perte de responsabilités.
Ces mesures ne sont pas des faveurs : elles relèvent d’un droit inscrit dans les principes directeurs des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées. Et elles bénéficient à l’entreprise : des collaborateurs soutenus sont des collaborateurs performants.
Miser sur l’individu : pleine conscience et activité physique
L’OMS recommande d’intégrer à la politique RH des programmes d’intervention individuelle, fondés sur des approches validées : thérapies cognitivo-comportementales, formation à la gestion du stress, ou sessions de pleine conscience.
Ces initiatives trouvent écho dans plusieurs entreprises marocaines du secteur technologique. Certaines ont mis en place des sessions hebdomadaires de yoga ou de méditation guidée, intégrées dans le temps de travail.
Par ailleurs, l’OMS souligne les effets démontrés de l’activité physique régulière sur la santé mentale : marche, musculation, exercices d’aérobie… Même en dehors du cadre médical, ces pratiques peuvent réduire l’anxiété, améliorer le sommeil et accroître la concentration.
De l’hygiène de vie à la stratégie RH
Les recommandations de l’OMS sont plus qu’un guide de bonnes pratiques : elles obligent les DRH à revoir leurs priorités. En traitant la santé mentale comme un indicateur de performance organisationnelle, et non comme une question périphérique, l’entreprise se donne les moyens de retenir ses talents, de limiter le turn-over et de bâtir une marque employeur solide.
La santé mentale n’est pas une affaire de psychologie individuelle : c’est un enjeu de gouvernance. Pour les DRH marocains, il s’agit désormais de passer de l’intention à l’action.







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