Après l’économie à la tâche, qu’on ne présente plus (livreurs Uber payés à la livraison, ou couturières payées à la pièce…), on a découvert un nouveau filon (d’or pur) dans cette énorme mine qu’est la gig economy. En l’occurrence, l’économie des micro-tâches.
Au Maghreb arabe, les études concernant ce genre de travail sont quasiment inexistantes. Mais en France, ils sont plus de 320 000 personnes qui se sont lancées dans cette ruée vers les micro-tâches, selon une étude de Télécom ParisTech, du CNRS et de MSH Paris Saclay. Le concept du « économie des micro-tâches » est simple et il doit être vu selon deux angles, pour être mieux compris : l’entreprise d’un côté et le micro-travailleur de l’autre.
Du côté de l’entreprise
L’entreprise est soit une entreprise opérant dans le domaine de la répartition du travail et a elle-même des clients (des clients qui la contactent car elle sait répartir le travail et s’occupe de tout question travailleurs : paiements, organisation, information, formation…) ou une boîte qui fait partie d’une boîte beaucoup plus grosse qui a besoin, pour ses divers travaux et besoins, de milliers et de centaines de milliers de travailleurs pour un ou des types de micro-travaux particuliers (citons par exemple le domaine de l’IA ; l’IA n’est qu’ensemble d’algorithmes et énormément de micro-tâches, réalisées par des humains, afin de la gaver de données…). Prenons le premier type pour donner un exemple compréhensible : cette entreprise reçoit un client qui lui donne un dossier contenant 500.000 images à détourer (enlèvement de l’arrière-plan avec un logiciel approprié). Remarquons, avant de poursuivre, que cette entreprise aurait pu engager une cinquantaine de salariés pour faire ça en quelques semaines. Mais elle s’adresse à l’entreprise de répartition de tâches à la place. Question : Pourquoi ? La réponse est simple : le temps… Ce sont des entreprises qui ont toujours un flux de milliers de « tâcheurs » connectés à n’importe quel moment. Ce travail sera effectué en un clin d’œil.
Rien qu’en France, toujours selon la précédente étude, 14 903 individus sont considérés comme « très actifs » sur ce type de plateformes, au minimum une fois par semaine. Le nombre de travailleurs considérés comme « réguliers », c’est-à-dire présents au moins une fois par mois s’élève, lui, à un peu moins de 52500 usagers. Quant aux travailleurs dits « occasionnels », ceux qui sont rythmés soit par l’inactivité soit par la pratique intensive des micro-tâches, leur nombre est de plus de 266.000 travailleurs. Rien qu’en France… Et c’est dans le monde que ça se passe. C’est facile de s’inscrire et d’être payé.
Quelques exemples de plateformes : Amazon Mechanical Turk, Microworkers, Clickworker, Clixsense, Wirk, Ferpection et Appen. Si les Européens et Américains s’y mettent, pourquoi pas les gens se trouvant là où la cherté de la vie est moindre ? A méditer.
Du côté du micro-travailleur
Chaque micro-travailleur doit d’abord savoir qu’il lui faudra, en une seule et unique journée, et s’il veut un revenu assez conséquent, jongler entre des dizaines, voire des centaines d’employeurs. Il faut aussi savoir qu’il faut faire montre de rapidité pour se réserver une ou plusieurs tâches dans l’effroyable amas de micro-travaux demandé. Le nombre de candidats est souvent astronomique, ils sont des millions à travers le monde entier à s’être lancés dans cette quête de micro-tâches.
Les travaux demandés peuvent sembler absolument loufoques : identifier des objets sur une image, retranscrire le contenu de tickets de caisse, traduire quelques lignes voire quelques mots, visiter un site Web, répondre à un questionnaire, modérer des contenus, trier des photographies, aller dans des supermarchés pour vérifier l’emplacement d’un shampoing particulier ou sa disponibilité… C’est, en somme, un travail que tous, ou presque, peuvent faire.
Bien entendu, il convient de ne pas s’attendre à grand-chose question avantages sociaux et protection. Même l’économie des micro-tâches souffre de cela, et ses travailleurs ne cessent de se plaindre et de taper à la porte des syndicats, partout dans le monde. Mais cette nouvelle « antenne » de la gig economy semble prometteuse pour lutter contre le chômage et, car beaucoup de micro-travailleurs ont déjà un travail à mi-temps ou à temps plein, lutter contre les insuffisances des salaires et les besoins urgents. Le micro-travail éloigne de nous trois grands maux : l’ennui, le vice et le besoin, aurait peut-être dit Voltaire.