L’upskilling et le reskilling sont des dispositifs courants pour développer les compétences dans certaines entreprises. Sont-ils devenus volontaires ou imposés par la crise sanitaire ?
Tout collaborateur doit développer son employabilité tant interne qu’externe s’il ne veut pas se trouver en train de faire le « tango », c’est-à-dire un pas en avant et deux pas en arrière ! Mais toute entreprise doit aussi faire « monter en compétences » ses collaborateurs et développer les compétences si elle ne veut pas que ces derniers deviennent une « charge » pour elle. C’est ce qu’on appelle l’upskilling qui est un terme anglophone. Or, si les entreprises tendent aujourd’hui vers ce type de concept, ce n’est pas essentiellement dû à la crise sanitaire mais je dirai plutôt au manque de compétences sur le marché de l’emploi. Il y a aujourd’hui un véritable gap entre les compétences requises recherchées par les entreprises et celles acquises par les candidats, au point que nous pourrions avancer que nous sommes beaucoup plus devant un chômage quantitatif que qualitatif. Or, ne dit-on pas en management que « la qualité l’emporte sur la quantité ». De ce fait, les entreprises n’ont d’autre choix que d’accompagner leurs collaborateurs dans la formation continue en prenant en charge les inscriptions de ces derniers auprès d’écoles qui assurent des formations professionnelles, ce qui se pratique en général les week-ends. L’objectif est que le collaborateur continue d’occuper convenablement son poste, voire évoluer dans la hiérarchie en lui confiant de nouvelles responsabilités. L’entreprise a intérêt à développer les compétences de son personnel si elle ne veut perdre en compétitivité. D’ailleurs, ce n’est pas par hasard que l’upskilling a été inscrit au programme du forum de Davos en janvier 2020.
Par opposition à l’upskilling, le reskilling concerne plutôt un collaborateur appelé à acquérir de nouvelles compétences pour changer de métier. Nous constatons de plus en plus ce type de « reconversion de métier » qui permet au collaborateur d’être en même temps polyvalent et polycompétent.
J’aimerais insister sur le fait qu’une compétence technique manquante peut s’acquérir ; ce qui est très difficile quand il s’agit de compétences comportementales que les anglo-saxons appellent les « soft skills ». J’avoue que je préférerai embaucher un candidat avec des soft skills porteurs de valeurs que de me fixer uniquement sur les compétences techniques du candidat. Tout au long de ma carrière professionnelle, j’ai eu à rencontrer des cadres financiers devenus d’excellents DRH, comme j’ai eu à promouvoir des commerciaux devenus d’excellents présentateurs audiovisuels.
Il y a un proverbe anglais qui dit « the change is as good as the rest » (le changement est aussi bénéfique que la sieste).
Quels métiers ou compétences peuvent-ils être concernés par les démarches ?
Comme je viens de le préciser, les soft skills sont des compétences essentielles pour ces deux programmes. Mais cela n’empêche pas l’entreprise à faire développer les compétences techniques de ses collaborateurs, notamment par la formation continue, les team-building, les séminaires qu’ils soient en intra ou en inter-entreprises. Il n’y a pas de restriction pour tel ou tel métier dans les programmes upskilling et reskilling. Faut-il aussi que le collaborateur soit motivé pour s’investir dans de nouveaux métiers et monter en compétences. L’objectif de ces programmes est que l’entreprise anticipe sur l’obsolescence des compétences pour réussir les mutations en évitant de se retrouver avec une restructuration sujette à un plan de licenciement. Comme disait Peter Drucker : « le meilleur moyen de prédire l’avenir est de le créer ».
Comment s’assurer de la réussite de ces dispositifs ?
En management des ressources humaines, plusieurs techniques sont utilisées pour évaluer le niveau de compétences des collaborateurs. En plus de l’entretien annuel d’évaluation qui a lieu en général une fois par an, je citerai le Plan de Développement des Compétences (PDC) qui permet d’identifier chez le collaborateur les compétences maîtrisées et celles à acquérir. Il précise également les objectifs de développement pour les mois ou les années à venir. Ajouter à cela le bilan de compétences pour évaluer la compétence avant et après la mise en place des programmes upskilling et reskilling. Toutefois, l’expérience m’a appris que la compétence s’exerce dans un contexte précis, car on peut être compétent dans un domaine mais pas dans un autre ; cette même compétence évolue dans le temps. Sachant aussi qu’il appartient à l’entreprise de repérer cette compétence, de l’évaluer, de la valider et de la faire évoluer.