L’idée qu’un emploi puisse être subdivisé en plusieurs tâches qu’il constitue, liées à des projets précis, puis chacune déléguée à un professionnel ne faisant pas partie du personnel de l’entreprise, a révolutionné le travail au cours de la dernière décennie. C’est la base de ce que l’on appelle aujourd’hui l’économie à la tâche (Gig economy). Cela est souvent associé aux travailleurs indépendants (freelance), et ce phénomène est en effet l’une de ses manifestations les plus marquantes. L’économie à la tâche est désormais un terme large qui englobe une variété de processus de gestion. Tandis que plusieurs ont attesté ses bénéfices pour les professionnels et les entreprises, il est également important de mentionner les risques qui y sont associés, ainsi que les effets possibles.
Au cours de la dernière décennie, la plateformisation (ou ubérisation), la dépendance croissante des entreprises vis-à-vis des indépendants, associée à une préférence écrasante des jeunes travailleurs pour une carrière indépendante, qui représente une part de plus en plus importante de la main-d’œuvre, a réussi à changer à la fois les réalités du travail quotidien et les processus de nombreuses entreprises. Cela a permis aux entreprises d’aller plus loin et de surmonter les obstacles grâce à une simple solution de contournement. La normalisation de cette pratique, preuve de sa convenance pour les entreprises, a réussi à cimenter pleinement ce nouveau modèle de travail pour les indépendants.
DÉFIS DES RH
Le premier défi que cela pose aux services RH est d’intégrer deux grands modèles différents, pour les contractuels et pour les indépendants. Le cycle du collaborateur freelance n’est toujours pas aussi bien défini et étudié que celui de l’employé. Cela signifie que les collaborations indépendantes comportent leurs propres risques et défis, et nécessitent de nouveaux processus. Le recrutement traditionnel évaluait la compétence globale du candidat, en soupesant les compétences et points forts par rapport aux faiblesses qui peuvent être développées. Dans l’économie à la tâche, l’accent est sur une tâche spécifique, qui nécessite généralement une seule compétence focale, ce qui élargit énormément le bassin de talents. Sans une intégration technologique appropriée, le processus d’intégration peut s’avérer ardu pour les départements RH.
L’impact des avancées technologiques et des intégrations digitales dans le travail est de loin le plus important catalyseur de l’économie à la tâche ; cela a facilité l’intégration de nombreux professionnels dans le freelance.
Selon une étude réalisée par la plateforme de freelance Upwork, intitulée The Great Resignation, plusieurs salariés envisagent de passer en freelance en conséquence au retour au bureau. Bien que ce ne soit pas une tendance significative dans plusieurs parties du monde, mais selon leurs chiffres, cela pourrait entamer une augmentation de 10 millions de professionnels dans la main-d’œuvre freelance.
La pandémie, ayant accéléré la transition vers des processus et des outils numériques, a illustré que dans la mesure où le travail repose de plus en plus sur des solutions technologiques, cela augmentera ainsi l’importance des freelancers. Les avancées technologiques ont peut-être permis à l’économie à la tâche d’exister, et la croissance en nombre des professionnels en freelance, c’est pourtant la pandémie qui avait montré l’importance de l’agilité dans les processus des entreprises.
AVANTAGES ET DURABILITE
Le principal avantage de l’embauche de personnes hors bilan est la flexibilité. Ainsi, les entreprises ont désormais la possibilité d’embaucher des experts, ce qu’elles ne feraient pas autrement, pour un projet spécifique, ainsi que de réduire les coûts de production. Par contre, ces avantages ont longtemps été définis principalement en termes de réduction, de maximisation des économies et de rendement. Une telle perspective oriente la plus grande partie des futurs développements possibles vers ces « objectifs ». Il s’agit d’un phénomène de plus en plus répandu avec des répercussions négatives.
Les connotations négatives de l’économie à la tâche et de l’ubérisation ont récemment gagné du terrain pour des raisons évidentes. Les promesses de la technologie n’ont pas été tenues, mais ont plutôt causé des conditions qui, malgré leurs nombreux résultats positifs, ont été décrites comme préjudiciables à la durabilité du modèle freelance. Cela signifie que, comme toutes les autres innovations et nouveaux modèles apportés par la technologie au monde professionnel, certaines des anciennes pratiques et idées préconçues sur le travail et la gestion se révèlent inefficaces. Un paysage changeant exige des pratiques changeantes et des méthodes agiles.