Delior Group est un acteur pionnier dans le secteur de la boulangerie, viennoiserie, pâtisserie et snacking au Maroc. Fondé il y a plus de 25 ans, le groupe s’est progressivement développé autour de trois marques principales : Paul, enseigne internationale bien connue du grand public, DELI’S, une branche industrielle leader au niveau national dans la fabrication de produits de boulangerie et de pâtisserie destinés aux professionnels de la restauration et de l’hôtellerie, ainsi que Chopain, une marque 100% marocaine distribuée dans plus de 400 points de vente et supermarchés. Forte d’un effectif global d’environ 1100 collaborateurs, l’entreprise s’appuie sur une culture fondée sur l’intelligence collaborative, le sens du collectif et un « leadership libératoire » visant à permettre à chaque collaborateur de développer son potentiel entrepreneurial. Le groupe se distingue par sa parité, la diversité des profils ainsi que la richesse de son parcours social et RH. L’approche globale, dénommée « Flow & Grow », promet à chaque collaborateur des défis stimulants, un accompagnement personnalisé et un engagement responsable, aussi bien sur le plan écologique que social. Dans cette interview, nous échangeons avec M. Mohamed GRAOUI, Directeur Capital Humain, sur le système d’entretiens annuels de Delior Group, un dispositif essentiel pour favoriser la performance, développer les compétences et ancrer le dialogue au cœur de la relation entre managers et collaborateurs.
L’entretien annuel d’évaluation occupe une place centrale dans le management des talents. Pourquoi ce dispositif est-il considéré comme crucial au sein de Delior Group ?
Mohamed GRAOUI : Au sein de Delior Group, l’entretien annuel d’évaluation est bien plus qu’une simple formalité RH. Il s’agit d’un dispositif central et stratégique, intimement lié à la promesse employeur du groupe, formulée autour de « Flow & Grow ». Cette approche incarne la volonté de proposer à chaque collaborateur des défis à sa mesure, tout en offrant les conditions nécessaires à son développement professionnel. L’entretien annuel devient alors le cadre privilégié pour évaluer les progrès, définir les axes d’évolution et orienter les plans de formation.
Ce processus d’évaluation est crucial car il permet de mettre en cohérence la performance individuelle et les objectifs collectifs de l’entreprise. Sans un outil d’évaluation fiable, il serait difficile d’identifier avec précision les potentiels, de mesurer les progrès réalisés d’une année sur l’autre et de bâtir des politiques de gestion des talents pertinentes. Les managers, qui sont au plus près des réalités opérationnelles, jouent un rôle essentiel : leur observation et leur jugement, structurés par un référentiel de compétences clair et partagé, fournissent une base solide pour orienter les décisions RH.
De plus, la culture Delior Group repose sur le dialogue managérial. L’entretien annuel n’est pas vécu comme un exercice isolé, mais comme un moment privilégié de feedback, d’échange constructif et de projection dans l’avenir. Il complète un écosystème plus large de communication interne, avec notamment plusieurs points de rencontre dans l’année et des dispositifs comme les comités « Tawasoul ».
Quelle programmation des entretiens annuels dans le calendrier RH de Delior Group ?
Mohamed GRAOUI : Cette année, la campagne d’entretiens annuels s’est déroulée entre juillet et septembre. Ce choix initial répondait à certaines contraintes internes, notamment l’articulation avec d’autres projets stratégiques en cours au sein de Delior Group. Cependant, la Direction Capital Humain évalue constamment l’efficacité et la pertinence du calendrier afin de le faire évoluer vers un moment plus adapté au cycle de performance de l’entreprise.
L’objectif est, à terme, d’initier les entretiens annuels plus tôt dans l’année, idéalement au printemps, par exemple au mois d’avril. En procédant ainsi, il deviendrait plus naturel d’intégrer l’évaluation individuelle dans la dynamique globale de la performance collective. Le décalage actuel, situé en été, peut poser des difficultés, en particulier du fait des congés, d’une saisonnalité variable dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie, et de la nécessité de disposer de données opérationnelles suffisamment stabilisées.
En anticipant les entretiens, Delior Group souhaite renforcer la cohérence entre la fixation des objectifs, la mesure de la performance et les décisions liées à la rémunération variable, la mobilité interne ou la formation. Une meilleure synchronisation permettrait d’optimiser la relation entre l’analyse de la tenue de poste, l’identification des écarts de compétences, la mise en place de plans de développement et la préparation des budgets annuels en formation ou en rémunération.
Concrètement, comment est structuré le processus d’entretien annuel au sein du groupe ?
Mohamed GRAOUI : Le processus d’entretien annuel chez Delior Group est le fruit d’une réflexion approfondie visant à doter les managers et les collaborateurs d’un cadre clair, cohérent et transparent. Initialement, les évaluations étaient réalisées sur support papier. Plus récemment, un passage à des outils digitaux, comme Microsoft Forms, a permis de faciliter la collecte des données et l’uniformisation des pratiques. À partir de 2025, l’ambition est de déployer un SIRH complet, afin de simplifier la gestion des entretiens, le suivi des performances et l’élaboration des plans de développement.
L’un des éléments clés est l’existence d’un référentiel de compétences, véritable fondation du processus. Ce référentiel, élaboré avec soin, définit précisément ce que signifient des qualités telles que l’innovation, le sens du service, la rigueur ou la capacité à travailler en équipe. Il propose également plusieurs niveaux d’appréciation, permettant de réduire la subjectivité et d’harmoniser la lecture des performances individuelles. Ainsi, un manager à Rabat et un autre à Mohammedia peuvent évaluer une compétence selon les mêmes critères, garantissant une certaine équité et justesse.
La préparation de l’entretien est également essentielle. Les collaborateurs sont invités à réaliser une auto-évaluation en amont, à réfléchir sur leurs réalisations, les formations suivies, les compétences développées ou encore les difficultés rencontrées. Ils peuvent ainsi arriver à l’entretien mieux préparés et plus à même de dialoguer sur leurs objectifs futurs. Les managers, de leur côté, ont accès à des formations, des supports et des guides pratiques pour conduire l’entretien dans de bonnes conditions. Le but est d’éviter que l’évaluation ne soit perçue comme un exercice strictement descendant. Au contraire, c’est un moment d’échange, de co-construction, où le collaborateur exprime ses aspirations et ses besoins, tandis que le manager l’accompagne, propose des axes d’amélioration, et identifie les points forts à consolider.
Tous les collaborateurs sont-ils concernés par l’entretien annuel, et quelles suites concrètes sont données aux données recueillies lors de ce processus ?
Mohamed GRAOUI : L’entretien annuel concerne l’ensemble des collaborateurs, quels que soient leur statut, leur niveau de responsabilité ou leur ancienneté. Cette approche inclusive reflète la conviction que chaque membre de l’entreprise contribue à sa performance globale et mérite un temps d’échange individuel. Ainsi, des équipes en point de vente, des artisans boulangers, des cadres dirigeants ou des fonctions support, tous sont invités à passer par ce dispositif. Cette universalité garantit une vision d’ensemble cohérente des talents, des besoins en formation et des axes d’amélioration.
Une fois les entretiens terminés, les données recueillies deviennent une matière première précieuse pour la Direction Capital Humain. Les fiches d’évaluation, les auto-évaluations, les besoins exprimés, les ambitions de carrière ou encore les axes de développement identifiés alimentent ensuite des analyses plus globales. Cela permet, par exemple, de construire des plans de formation sur-mesure, ciblant précisément les compétences à renforcer. Le référentiel de compétences, déjà mis en place, joue un rôle capital dans ce travail, en facilitant l’identification des écarts et des priorités.
De plus, les informations issues des entretiens annuels servent de fondement à la gestion de la performance et des talents dans son ensemble. Elles peuvent être croisées avec d’autres indicateurs, tels que la performance collective, la productivité, les résultats financiers de l’entreprise, ou encore les objectifs stratégiques à moyen terme. Le but est d’aboutir à des décisions justes et éclairées, aussi bien en matière de promotions, de mobilités internes, de révisions salariales ou de bonus.
Ce dispositif est donc conçu non seulement pour évaluer la performance passée, mais aussi pour anticiper l’avenir, révéler les potentiels et impulser une dynamique de progrès continu.
Comment faites-vous la part entre la performance individuelle et la performance collective, notamment si certains collaborateurs excellent individuellement alors que les résultats globaux de l’entreprise ne sont pas au rendez-vous ?
Mohamed GRAOUI : La performance individuelle n’est jamais déconnectée de la performance collective. L’entreprise a mis en place un dispositif structuré, qui repose sur plusieurs niveaux de résultats : la performance de l’entreprise dans son ensemble, celle de la direction ou du périmètre d’activité auquel appartient le collaborateur, et enfin la performance individuelle proprement dite. Ce mode de calcul permet de doser le poids de chacun de ces éléments en fonction du niveau hiérarchique, de la nature du poste et de l’impact effectif sur les résultats globaux.
Par exemple, un cadre dirigeant, qui a plus d’influence sur la stratégie globale, verra une part importante de son bonus indexée sur les performances de l’entreprise dans son ensemble. À l’inverse, un technicien ou un collaborateur opérationnel, dont le rayon d’action est plus limité, ne sera pas pénalisé de la même manière par des résultats globaux moins favorables. Ainsi, en modulant les critères d’évaluation et les pondérations, Delior Group veille à ce que le système de reconnaissance reste équitable et motivant pour tous.
Pour maintenir l’engagement et la compréhension de ces mécanismes, l’entreprise communique régulièrement sur la logique qui sous-tend ce système de bonus, les référentiels utilisés et les objectifs poursuivis. Les managers sont formés pour expliquer à leurs équipes comment les différentes composantes du système d’évaluation interagissent.
Quel conseil donneriez-vous à des responsables RH qui souhaitent mettre en place un dispositif d’entretien annuel dans leur organisation ?
Mohamed GRAOUI : Le principal conseil est de ne pas négliger la construction d’un socle solide d’outils et de référentiels. L’évaluation des compétences et de la performance ne doit pas reposer uniquement sur l’intuition ou la subjectivité. Un référentiel clair, partagé et adapté à la culture de l’entreprise est un atout majeur. Il permet de définir ce que signifient concrètement les compétences clés, d’en fixer des niveaux et de limiter ainsi les écarts d’interprétation entre managers.
Toutefois, l’absence initiale d’outils ne doit pas paralyser l’action. Il est possible de débuter modestement, en intégrant progressivement un référentiel ou des grilles d’évaluation standardisées. L’essentiel est d’être dans une dynamique d’amélioration continue, d’écouter les retours des managers et des collaborateurs, et d’ajuster le dispositif au fil du temps. L’utilisation de solutions digitales, SIRH ou questionnaires en ligne, peut aussi simplifier la gestion du processus et améliorer la qualité des données collectées.
Par ailleurs, la formation des managers est cruciale. Un entretien annuel réussi repose sur leur capacité à donner un feedback constructif, à adopter une posture bienveillante et à créer un climat de confiance. Il ne s’agit pas de cocher des cases, mais de conduire un échange réellement utile, qui aidera le collaborateur à progresser et à se projeter. Les managers doivent être outillés, formés et accompagnés pour être en mesure de jouer leur rôle.
Enfin, il est important de valoriser l’entretien annuel comme un moment clé dans la vie de l’entreprise. Communiquer de manière récurrente sur l’intérêt du dispositif, rappeler l’alignement entre les objectifs individuels et collectifs, souligner le lien avec la formation, la rémunération, la mobilité interne et la construction de carrière, tout cela contribue à donner du sens à l’exercice. Ainsi, loin d’être une formalité, l’entretien annuel devient un pilier du management des talents et de la performance, un outil puissant pour soutenir la dynamique de croissance et d’épanouissement professionnel