inwi est un opérateur global de télécommunications au Maroc, offrant des solutions de pointe en téléphonie fixe, internet et mobile, ainsi que des services numériques de qualité supérieure. L’entreprise se distingue par son engagement dans l’infrastructure du pays, en déployant des solutions innovantes allant de l’ADSL pour un large public au FTTH pour des débits élevés, en passant par des services mobiles tels que la Box 4G et le VSAT pour les zones reculées. Forte de ses investissements, inwi se positionne comme un acteur clé dans la transformation numérique du Maroc, contribuant activement à l’inclusion numérique à travers ses services cloud, de cybersécurité et ses centres de données aux normes internationales.
Dans l’interview qui suit, Rachid BAKKAR, Directeur des Ressources Humaines chez inwi, partage sa vision sur l’entretien annuel comme un levier stratégique pour le développement des talents et la gestion des carrières. Il nous explique comment cet entretien s’intègre dans une approche globale de la gestion des ressources humaines, visant à offrir des perspectives de croissance aux collaborateurs tout en soutenant les objectifs stratégiques de l’entreprise.
L’entretien annuel d’appréciation chez INWI revêt une importance particulière. Pourriez-vous nous expliquer en quoi ce moment est décisif et comment il s’inscrit dans votre politique RH globale ?
Rachid BAKKAR : Chez inwi, l’entretien annuel d’appréciation est bien plus qu’une simple formalité administrative, il constitue un temps fort du cycle de management des talents. Nous souhaitons qu’il devienne un véritable temps de « communion » entre le collaborateur et son manager, s’inscrivant dans un dispositif global conçu pour accompagner l’évolution de carrière de chaque salarié, tout en répondant aux enjeux stratégiques de l’entreprise. Loin de se limiter à un exercice isolé, cet entretien intervient après un processus plus large incluant la People Review et le comité carrière.
Concrètement, la People Review permet de passer en revue, direction par direction, l’ensemble de nos collaborateurs. Ce processus examine non seulement la performance, mais aussi le potentiel, les demandes de mobilité ou de formation, ainsi que les perspectives d’évolution professionnelle. Il en résulte une vision panoramique des compétences, des forces et des axes de progrès au sein de l’entreprise. Les résultats de cette étape servent ensuite de base du comité carrière, où sont validés des scénarios de promotion, de mobilité interne, voire des trajectoires de succession sur certains postes clés. Ces éléments stratégiques, consolidés en amont, constituent des inputs précieux pour préparer l’entretien annuel d’appréciation.
Cet entretien n’est pas seulement l’occasion de faire le bilan de l’année écoulée – en évaluant de manière objective les objectifs fixés, les réalisations, les succès comme les axes d’amélioration – mais aussi de projeter le collaborateur dans l’année suivante. C’est une occasion pour fixer des objectifs adaptés aux orientations globales de l’entreprise, tout en tenant compte des aspirations individuelles. L’approche est résolument participative : le manager apporte son point de vue, mais le collaborateur est également invité à partager ses aspirations, ses priorités, ses besoins en formation, voire ses souhaits de mobilité. Ainsi, l’entretien annuel d’appréciation devient un moment clé non seulement pour consolider la confiance entre le management et les collaborateurs, mais aussi pour s’assurer que chacun avance dans la même direction, avec une vision claire et partagée des enjeux de l’organisation.
Vous évoquez la People Review et le comité carrière. Pourriez-vous détailler comment s’articule ce cycle de talent management et quelles sont les différentes étapes qui préparent l’entretien d’appréciation ?
Rachid BAKKAR : Le cycle de talent management chez inwi s’étend sur plusieurs mois, généralement d’octobre à mars, et se compose de plusieurs étapes clés : la People Review, le comité carrière, l’entretien annuel d’appréciation, puis le comité de rémunération.
La première étape, la People Review, mobilise nos HR Business Partners et le département Talent Management. Ensemble, ils examinent, avec chaque manager de proximité, la situation de leurs équipes. Cette revue vise à identifier les points forts, les axes d’amélioration, les potentiels d’évolution et les besoins en formation de tous nos collaborateurs. L’objectif est d’obtenir une vision fine et exhaustive, poste par poste, afin de mieux comprendre la dynamique interne. Les managers partagent leurs observations, leurs ambitions pour leurs équipes, ainsi que les éventuelles aspirations exprimées par leurs collaborateurs (mobilité, évolution, etc.).
Une fois cette étape achevée, nous synthétisons les informations recueillies pour les présenter aux membres du comité carrière. Composé des directeurs concernés, ce comité examine les scénarios d’évolution, de promotion ou de changement de poste. Il s’agit ici de valider, challenger ou affiner les propositions issues de la People Review. Les décisions prises lors de ce comité alimentent ensuite les entretiens annuels d’appréciation. Ainsi, lorsque le manager rencontre son collaborateur, il dispose déjà d’orientations claires concernant ses possibilités d’évolution, les formations envisageables, ou encore les parcours de carrière potentiels.
L’étape suivante est précisément l’entretien annuel d’appréciation, moment privilégié d’échange entre le manager et le collaborateur. Cet entretien est nourri des informations issues de la People Review et du comité carrière. Enfin, le cycle se conclut par le comité de rémunération, qui, en tenant compte de la performance validée lors de l’entretien, des promotions ou des évolutions de responsabilités, ajuste les éléments de rémunération, notamment la part variable. Ainsi, chaque étape du cycle est cohérente avec la précédente, garantissant une approche globale et structurée de la gestion des talents.
Vous avez mentionné l’importance de fixer des objectifs. Comment parvenez-vous à définir des objectifs cohérents, mesurables et alignés avec les enjeux stratégiques de l’entreprise, tout en tenant compte des spécificités des différents postes ?
Rachid BAKKAR : La définition d’objectifs clairs et pertinents est un enjeu majeur pour le bon déroulement de l’entretien annuel d’appréciation. Chez inwi, nous veillons à mettre en place des objectifs SMART, c’est-à-dire Spécifiques, Mesurables, Atteignables, Réalistes et Temporellement définis, qui répondent aux orientations stratégiques de l’entreprise tout en restant adaptés à chaque contexte opérationnel.
Pour ce faire, nous partons des objectifs globaux de l’organisation, comme les orientations stratégiques définies par la direction générale. Ces objectifs d’entreprise se déclinent ensuite à l’échelle des directions, des services, et enfin des individus. Par exemple, un objectif de croissance du chiffre d’affaires sera interprété différemment par une équipe commerciale, qui se concentrera sur les volumes de ventes ou sur les indicateurs de conquête client, et pour un service RH, où l’accent sera mis sur la qualité des recrutements et les délais de satisfaction des besoins en ressources. De même, certains objectifs, plus qualitatifs, peuvent porter sur le développement des compétences d’une équipe ou sur l’amélioration du climat social. Dans ce cas, nous cherchons à identifier des indicateurs indirects, tels que la réduction du turnover, le taux d’absentéisme ou la satisfaction des collaborateurs mesurée par des enquêtes internes.
Le rôle du manager est central dans cette démarche. Il doit être en mesure de traduire les ambitions de l’entreprise en objectifs concrets et adaptés à chaque poste et collaborateur. Pour l’accompagner dans cette tâche, nous lui fournissons un kit d’accompagnement comprenant des conseils couplés à des sessions de formation pour maitriser la logique SMART. Nous encourageons également les managers à préparer en amont l’entretien, en rassemblant des données factuelles et en identifiant les KPIs les plus pertinents. Une fois les objectifs fixés, ceux-ci servent de repère tout au long de l’année, permettant de mesurer les progrès, d’ajuster le cap en cours de route, et finalement d’évaluer objectivement la performance lors de l’entretien annuel d’appréciation.
Vous avez abordé la notion de potentiels d’évolution et de mobilité interne. Comment inwi anticipe-t-elle ces mouvements de carrière et quels outils utilisez-vous pour mieux aligner compétences, besoins futurs et parcours professionnels ?
Rachid BAKKAR : Anticiper les évolutions de carrière et offrir des perspectives de mobilité interne est un pilier majeur de notre stratégie RH. Pour cela, nous développons progressivement une véritable cartographie des compétences au sein de inwi, basée sur un référentiel complet qui recense les compétences nécessaires pour chaque poste, qu’il s’agisse de fonctions techniques (télécommunications, IT, finance) ou de rôles plus transverses (commercial, support, RH).
Notre objectif est de disposer d’une « bibliothèque de compétences » claire et actualisée, permettant de mesurer le niveau de compétences actuel d’un collaborateur avec les exigences du poste ciblé. Par exemple, si un vendeur boutique souhaite évoluer vers une fonction de support commercial au siège, nous analysons le gap de compétences existant : maîtrise des langues, niveau de connaissance des outils internes, aisance dans l’analyse de données, etc. Sur cette base, nous pouvons proposer un parcours de formation sur mesure, étalé sur 12, 18 ou 24 mois, pour permettre au collaborateur de progresser.
La People Review et le comité carrière sont, en effet, des moments propices pour identifier ces potentiels. Accompagnés des HR Business Partners, les managers analysent le profil de chaque collaborateur ainsi que ses compétences, aspirations et axes de développement. Les potentiels identifiés sont ensuite suivis de près pour bénéficier de plans de développement, de formations ou de projets transversaux.
Nous envisageons progressivement l’intégration d’approches plus avancées, comme la méthode de la « nine box grid », qui permet de classer les collaborateurs en fonction de leur performance et leur potentiel. Cela offre une vision plus fine des talents à fort potentiel, de ceux qui nécessitant un accompagnement spécifique, et de ceux dont les perspectives d’évolution rapide peuvent être envisagées. In fine, notre ambition est de créer un environnement interne où chaque collaborateur trouve une voie d’évolution cohérente, soutenue par une gestion rigoureuse des compétences et des opportunités.
Vous avez mentionné l’importance de la période idéale pour réaliser l’entretien d’appréciation, ainsi que la valeur d’un entretien de mi-parcours. Pourquoi est-ce si crucial de bien cadrer le calendrier de ces entretiens et comment cela améliore-t-il le processus ?
Rachid BAKKAR : Le succès d’un entretien annuel d’appréciation dépend en partie sur le choix du moment où il est réalisé. Chez l’opérateur global, nous recommandons de programmer l’entretien principal entre la mi-décembre et la mi-janvier. Cette période est idéale car elle coïncide avec la clôture de l’année écoulée et la préparation de la nouvelle année. Ainsi, le collaborateur et le manager disposent d’une vision claire des réalisations passées, des objectifs atteints ou non, et des priorités à établir pour les mois à venir.
Au-delà de l’entretien principal, nous préconisons également un « entretien de mi-parcours » aux alentours du mois de juin. Cet échange intermédiaire permet de faire un point d’étape, d’ajuster les objectifs fixés en début d’année, d’abandonner ceux devenus obsolètes ou d’en introduire de nouveaux si le contexte le requiert. Par exemple, si un objectif commercial n’est plus pertinent en raison de changements dans le marché ou dans la stratégie de l’entreprise, il est judicieux de le réviser avant la fin de l’année. Ainsi, le collaborateur n’est pas pénalisé par des objectifs irréalisables et le manager peut réaligner les priorités.
Cette flexibilité renforce la crédibilité et l’efficacité de l’entretien d’appréciation. Au lieu de constituer un simple rituel figé, il devient un outil dynamique, intégré au cycle business de l’entreprise. De plus, le collaborateur sent que son travail est évalué équitablement, sur la base de critères actualisés. Cela nourrit la confiance, la motivation et l’engagement.
Bien entendu, selon la nature du poste, le recours à un entretien de mi-parcours peut être plus ou moins pertinent. Certaines fonctions, très liées à la saisonnalité, en tireront un grand bénéfice, tandis que d’autres s’appuieront sur un suivi plus informel et continu. Quoi qu’il en soit, ce cadre temporel permet de maintenir une cohérence tout au long de l’année, d’offrir un feedback régulier et de mieux anticiper les ajustements nécessaires.
Vous avez souligné l’importance d’une notation cohérente et équitable. Comment INWI s’assure-t-elle que les évaluations reflètent réellement la performance, sans être biaisées par des appréciations subjectives ou la « main légère » de certains managers ?
Rachid BAKKAR : La crédibilité du processus d’évaluation repose largement sur la cohérence et l’équité de la notation. Au sein de l’entreprise, nous accordons une grande importance à la définition de critères et de niveaux de performance compréhensibles par tous. L’idée est d’éviter des écarts trop marqués entre les managers qui auraient tendance à noter très haut ou très bas, sans référentiel commun.
Concrètement, cela signifie expliquer clairement ce que représente une évaluation à 100 %, 90 % ou 85 %. Par exemple, un collaborateur évalué à 85 % comprend que cette notation reflète une performance solide, conforme aux standards de l’entreprise, et non une simple appréciation subjective. Cette approche, fondée sur des critères clairement définis, permet d’éviter les disparités de perception entre différents managers pour un même niveau de performance. De plus, nous encourageons l’utilisation de faits concrets, de données chiffrées, de projets réussis ou d’indicateurs mesurables, plutôt que des impressions générales.
La Direction des Ressources Humaines joue un rôle de garant dans ce processus. Elle analyse les évaluations, identifie les anomalies ou les cas extrêmes, et n’hésite pas à challenger les managers. Par exemple, si un manager attribue systématiquement à ses collaborateurs 100 %, ou à l’inverse des notations trop faibles, nous cherchons à comprendre les raisons. Cela peut révéler une mauvaise compréhension du référentiel d’évaluation, ou plutôt une situation particulière dans l’équipe en question. Dans tous les cas, un dialogue s’instaure pour comprendre la situation, et le cas échéant, réajuster la notation.
Des formations sont également proposées pour uniformiser les pratiques. Les managers reçoivent, de prime abord, un guide sur la conduite des entretiens, apprennent à rester factuels, à préparer l’entretien en amont, et à fournir des feedbacks constructifs. Ainsi, l’évaluation devient un exercice fondé sur des critères tangibles, ce qui limite les biais tout en renforçant la perception d’équité. À terme, cela contribue à instaurer une culture de confiance, où chaque collaborateur sait que sa performance est jugée de manière juste et transparente.
Vous avez mentionné le rôle de la DRH pour accompagner les managers. Quels sont les dispositifs mis en place pour aider les responsables hiérarchiques à mener cet entretien de manière constructive et pour garantir une réelle utilité du processus ?
Rachid BAKKAR : L’implication des managers est essentielle dans la réussite de l’entretien d’appréciation. Pour les aider, nous avons mis en place plusieurs dispositifs visant à les accompagner, les former et les informer.
D’abord, chaque nouveau manager reçoit un « kit d’accompagnement », un guide pratique qui détaille l’ensemble du processus : la préparation, la conduite de l’entretien, la fixation d’objectifs SMART, la notation, ou encore la gestion des situations délicates. Ce document est mis à jour régulièrement, et tous les collaborateurs récemment promus à des fonctions managériales y ont accès.
Ensuite, nous organisons des sessions de formation conçues pour accompagner les manages dans la conduite de l’entretien annuel. Ces formations, ouvertes à tous les managers, qu’ils soient nouveaux ou expérimentés, offrent l’opportunité de mieux comprendre les enjeux, d’améliorer leurs pratiques, ou simplement consolider certaines notions. Elles couvrent des aspects essentiels tels que la préparation de l’entretien, l’analyse des objectifs, l’appui des évaluations sur des faits concrets, ou encore la communication d’un feedback constructif. Nous insistons également sur l’importance des valeurs fondamentales comme le respect mutuel, l’écoute active, et de la clarté dans les échanges.
La DRH et les HR Business Partners restent disponibles pour répondre aux questions, clarifier un point du référentiel d’évaluation, ou aider à identifier des indicateurs pertinents. Ils agissent également comme des médiateurs lorsque des divergences apparaissent entre un collaborateur et son manager. Dans ces cas, un arbitrage neutre et factuel peut être mené pour assurer une solution équitable.
Par ailleurs, nous insistons sur le fait que l’entretien annuel ne doit pas être axé uniquement sur la rémunération. Bien qu’un lien existe avec le comité de rémunération, l’essentiel de l’exercice porte sur la performance, la progression et le développement professionnel. Ainsi, en apportant des outils concrets et un soutien constant aux managers, nous nous assurons que l’entretien d’appréciation soit un vrai levier de motivation, de développement et de cohésion, plutôt qu’une simple formalité administrative.
Quelles recommandations donneriez-vous à une PME qui souhaite mettre en place un système d’entretien d’appréciation, mais qui n’en a jamais organisé auparavant ?
Rachid BAKKAR : Pour une PME qui souhaite introduire des entretiens d’appréciation, il est essentiel d’adopter une approche simple et progressive, tout en assurant la cohérence et la crédibilité du processus. L’expérience nous montre que le succès repose avant tout sur la conviction et de l’engagement du top management. Si la direction générale y croit sincèrement et perçoit cet outil comme une valeur ajoutée, cette conviction se diffusera naturellement au sein de l’entreprise, conférant du sens et de l’efficacité à l’exercice.
Il n’est pas nécessaire de disposer immédiatement de logiciels complexes ou de grilles d’évaluation sophistiquées. Un simple tableau Excel, bien structuré, peut suffire dans un premier temps. L’essentiel est de définir clairement les objectifs : pourquoi instaurer cet entretien ? Quels résultats attend-on ? Les finalités peuvent inclure l’amélioration de la performance, l’identification des potentiels internes, la préparation de la relève sur certains postes ou encore le renforcement de la communication interne.
Ensuite, une communication claire autour du dispositif est indispensable. Il est crucial d’expliquer à tous les collaborateurs que ces entretiens sont avant tout des moments de dialogue, d’écoute et d’analyse factuelle des réalisations ainsi que des axes d’amélioration possibles. L’objectif est de créer un cadre bienveillant où chacun peut s’exprimer et apporter des propositions. Le temps de préparation est aussi essentiel : accorder quelques jours aux collaborateurs et aux managers pour rassembler les informations essentielles, réfléchir aux objectifs futurs et préparer leurs arguments.
Il est tout à fait possible de débuter avec un cycle simple, sans lier immédiatement les résultats aux rémunérations. Toutefois, à moyen terme, il est recommandé d’envisager un lien, même symbolique, avec une récompense (comme une formation, un bonus ou une évolution), afin de donner une dimension concrète et motivante à l’exercice. Enfin, il est crucial d’adopter une démarche d’amélioration continue : ajuster le processus chaque année en tenant compte des retours terrain et des évolutions de la PME. C’est ainsi que l’entretien d’appréciation deviendra un outil durable et réellement efficace.