La Grande Démission est désormais un sujet de débat dans la plupart des milieux, services et publications RH et management. Depuis qu’Anthony Klotz a inventé ce terme dans une interview, il semble y avoir un intérêt croissant pour un phénomène aussi inédit. Dans un contexte global de pénurie de main-d’œuvre persistante, et de nombreux secteurs économiques enregistrant de grosses pertes, tant en affaires qu’en personnel, ce fut l’une des très rares fois dans l’histoire où la baisse des taux de recrutement n’a rien changé quant au pourcentage d’employés démissionnaires. En fait, ce taux a atteint des niveaux sans précédent.
Pour ces raisons et plus encore, Universum Global, l’une des agences de marque employeur et cabinet d’études les plus renommées, présente dans plus de 20 pays, a exhibé son dernier webinaire La grande démission contre le grand manque de candidatures le 29 septembre. La session a été présentée par Steve Ward, directeur Royaume-Uni et Irlande chez Universum.
Au début du webinaire, Ward avait montré que ce qu’on désigne aujourd’hui la Grande Démission est un problème bien établi. Dans les médias généralistes et spécialisés, l’anormalité d’une grande partie des effectifs démissionnaires, dans l’incertitude de la conjoncture économique actuelle, a en effet été digne d’attention et d’analyse. La première chose à établir pour bien comprendre l’ampleur de cette situation est de savoir si les employés ont subi des impacts négatifs pendant la pandémie. Cela est tout à fait évident, cependant, selon une étude menée par Universum UK, tout au long de 2020, le pourcentage de professionnels prêts à changer d’employeur dans un délai d’un an ou moins avait été plus ou moins stable. L’augmentation significative ne commence qu’au printemps 2021.
En effet, au cours des premiers mois de la pandémie, le plus grand nombre d’organisations ont peut-être fait preuve d’un réel engagement, pour être un refuge pour leurs employés et les soutenir pendant la crise. Comme l’a dit Steve Ward dans le webinaire : « Lorsque la crise a éclaté, nous étions fantastiques. Nous avons pris soin de nos employés, nos dirigeants étaient visibles et nous avons soutenu nos employés, leurs familles, et nous avons également examiné comment former et développer les capacités des employés. Nous les avons également équipés pour le travail à distance. Nous avons si bien réussi à créer un esprit de vraie convivialité. Mais en 2021, cela est en quelque sorte tombé en panne ».
Il y a bien sûr plusieurs raisons derrière un afflux massif de démissions, mais elles peuvent toutes être attribuées à une sorte d’insatisfaction face aux conditions et perspectives de travail actuelles. Ward cite ici une autre partie de l’Universum UK Professional Talent Research ; une enquête menée au cours de la même période (fin 2020 à l’été 2021). Ce sondage montre un taux plus ou moins stable d’employés qui ont répondu en ayant une confiance totale dans la vision et les dirigeants de leurs organisations. L’instabilité se manifeste chez les employés qui avaient « quelque peu » fait confiance aux dirigeants et à la vision de leurs organisations ; une catégorie qui comprend les employés qui ont encore des réserves sur le fonctionnement de leurs employeurs. Selon les recherches, cette cohorte a connu une baisse significative entre la fin de 2020 et le second trimestre de 2021.
Cela montre essentiellement comment le terrain d’entente a changé, et en regardant le taux d’employés qui ont répondu par la négative concernant leur confiance en la vision et direction de leurs organisations, nous remarquons une augmentation du même taux. Steve Ward retrace cela comme le début de la Grande Démission ; lorsque la méfiance au sein de l’organisation est devenue plus courante. Un autre sujet souvent évoqué dans ce contexte est le télétravail. La question qui s’impose, compte tenu du bras de fer sur le télétravail entre employeurs et salariés à partir de début 2021, est-ce vraiment le télétravail qui est en cause ?
Dans le webinaire, il est présenté comme un enjeu central dans la grande démission. Cela ne veut pas dire que les travailleurs démissionnent principalement parce que le choix du télétravail est stigmatisé ou n’est plus une option. C’était plutôt une période de reconsidération. Le télétravail avait montré que bon nombre des maux associés au travail peuvent être évités avec un degré d’autonomie et de confiance accordé aux employés. Selon le même Professional Talent Research, les travailleurs ont déjà des préoccupations par rapport au télétravail ; soit le fait de passer à côté de certains aspects bénéfiques du travail au bureau, ou comme une contrainte sur la relation avec l’employeur. Cela n’avait fait que rendre le retour au bureau pour les employés plutôt une obligation. Ce sentiment de peur, d’inquiétude et d’incertitude a marqué une grande partie du monde des affaires et les marchés d’emploi. À ce sujet, Steve Ward évoque la notion du ‘havre de sécurité’, affirmant que les employeurs devraient redevenir un havre de sécurité pour leurs employés dans un monde marqué par la confusion et l’incertitude.
Si la grande démission a fait des ravages dans les organisations et les entreprises, et a amené à focaliser certains aspects problématiques de la réalité quotidienne du travail, elle laisse encore des questions sur les raisons pour lesquelles les applications sont encore rares. Il y a plusieurs interprétations possibles pour cela ; les talents s’orientent-ils vers des carrières indépendantes ? Les préoccupations ne sont-elles pas satisfaites ? Ou les talents ne sont pas certains de savoir à qui ils peuvent faire confiance ? Les relations entre employeurs et employés connaissent aujourd’hui une évolution rapide, et compte tenu des tendances économiques actuelles, de la transformation de l’entreprise moderne et de la guerre des talents, il y a plus de besoin de transparence entre une entreprise et son personnel. L’accent de cette époque est davantage mis sur la durabilité des entreprises, en particulier en temps de crise, et en tant que tel, le rapport entre les entreprises, leurs employés et leurs communautés s’est avéré nécessiter une transformation.