Le développement de l’intelligence artificielle et du big data contribue, depuis quelques années à ce qu’on pourrait appeler une métamorphose de fonction RH, et ce avec une prolifération d’outils et de logiciels qui offrent des services RH à partir d’algorithmes et de traitement de données maintenant presque partout disponibles. Traditionnellement, la fonction RH faisait l’objet d’une administration de l’entreprise ou autrement dit le service qui assure la gestion de dossiers de chacun de ses collaborateurs. De nos jours, et suite à l’avènement des SIRH (systèmes d’information RH), ces dossiers sont devenus des données et peuvent être croisées traités en même temps avec beaucoup d’autres. Il s’agit désormais d’informations qui, une fois analysées, vont permettre d’apporter des indications nouvelles sur les collaborateurs, leurs motivations, leurs attentes, leurs besoins, etc.
Bien que les entreprises aient bel et bien commencé à utiliser des outils s’appuyant sur des algorithmes d’intelligence artificielle pour améliorer certains processus, l’usage de ces technologies reste encore à ses débuts. Toutefois, si la fonction ressources humaines va de plus en plus refléter son nom et devenir celles des relations humaines, la question des outils est certes un atout à exploiter mais ne devrait jamais être centrale. De manière plus générale, l’abondance actuelle en matière d’applications RH nécessite un certain échange et un partage des pratiques de tout un chacun, et plus particulièrement pour le management RH. Sur cette dernière thématique, ces partages se concrétisent par certains canaux de communication que l’on retrouve dans les Market Places. Il s’agit de structures en réseau qui jouent cette fonction, mais quelques grandes entreprises créent aussi en interne des événements susceptibles de déployer des moments d’échange et de partage sur les pratiques RH, créant ainsi une vraie communauté RH qui cherche à apprendre des autres dans leurs diverses pratiques, et ce dans un objectif d’apprendre et de se compléter mutuellement.
Or, à l’instar de toutes les autres grandes fonctions d’une entreprise, il s’avère fondamental pour la DRH de déployer ses propres réseaux sociaux d’entreprise qui, sous la supervision de la fonction RH, doivent être convenables et en parfaite harmonie avec les valeurs et la culture de l’entreprise. De ce fait, il faudrait rester vigilant quant aux pratiques managériales de leurs animateurs, à leurs modes de régulation, plus particulièrement les aspects les plus sensibles tels que la rémunération, les mises à disposition humaines, les ressources techniques déployées, l’implication personnelle, etc. Encore, et c’est très important, la pérennité de telles communautés repose sur leurs modes de gouvernance et l’implication de beaucoup de personnes, et cela est également un champ d’intervention des RH.
La rémunération : de nouvelles facettes ?
Si l’on demande aux professionnels de la fonction RH quelle est la tâche la plus fastidieuse, la grande majorité répondra : la paie. De ce fait, et vu que ce processus s’appuie sur énormément de données et d’informations, il s’agit probablement de la mission RH qui a le plus bénéficié de l’intelligence artificielle et de l’automatisation.
Aujourd’hui, et grâce à l’avènement du machine learning, couplé au big data, les effets sur la gestion de la paie sont gigantesques. En fait, des milliards de lignes de données, autrefois inaccessibles à l’être humain de par leur nombre et leur diversité, deviennent à la portée et même exploitables. Désormais, les logiciels de paie évoluent constamment par leurs algorithmes en automatisant de plus en plus les processus à travers des analyses et des préconisations de corrections ou d’optimisation, que ce soit dans comptabilité, la facturation, les indemnisations, etc. Cela dit, ces outils technologiques, malgré le haut niveau qu’ils ont atteint, ont toujours besoin de s’améliorer davantage pour permettre aux très grandes entreprises, avec des milliers de collaborateurs, de traiter toutes leurs données de manière aussi efficace que les petites et moyennes entreprises.
L’information, à la portée de tous !
Partout dans le monde, et quelle que soit la taille de l’entreprise ou encore son secteur d’activité, les collaborateurs sont de forts demandeurs d’information. Ce besoin, parfois persistant, représente pour la fonction RH une charge importante de travail pour y répondre et, surtout, un processus chronographe. Il semble alors que l’intelligence artificielle, à travers le développement des chatbots, constitue une bouée de sauvetage pour les professionnels RH. En principe, il s’agit de robots dotés d’une capacité de dialoguer avec une personne afin de répondre à ses questions. Ces robots donnent des réponses en langage naturel à partir d’une bibliothèque de questions et réponses gérée dans un logiciel.
En effet, l’intelligence artificielle a connu dans ce sens un énorme progrès permettant d’analyser et de comprendre les questions, mais surtout en se dotant de capacités d’auto-apprentissage, ce que l’on appelle l’apprentissage automatique ou machine learning. Il s’agit principalement de la conception, l’analyse, le développement et l’implémentation de méthodes permettant à une machine d’évoluer par un processus systématique, et ainsi de remplir des tâches difficiles ou problématiques par des moyens algorithmiques plus classiques.
En revanche, il faudrait bien garder à l’esprit que ces possibilités restent malgré tout relatives et ne sont pas, au moins pour le moment, capables de remplacer l’intervention humaine de manière totale. Certes les chatbots peuvent répondre à des demandes purement administratives mais ne peuvent pas remplacer une présence qui induit d’autres dimensions, faites d’écoute, d’empathie et de partage, humaines tout simplement.
Mobilité interne, une vraie révolution
Une politique de mobilité est indispensable au sein de toute entreprise et devient de plus en plus complexe à élaborer si le nombre de collaborateurs est relativement grand. En effet, les responsables en ressources humaines RRH sont amenés à bien maîtriser tous les postes à pourvoir sur l’ensemble des établissements affiliés à l’entreprise. Cela doit être fait tout en prenant en compte les évolutions professionnelles que peut avoir un collaborateur et les potentialités qu’il peut avoir à partir de formations complémentaires dans lesquelles ils pourraient s’engager et élargir ainsi son employabilité. De ce fait, les différents outils de cartographie permettent ainsi de visualiser les proximités et de structurer un volume conséquent de données RH qui, vu leur quantité, sont complexes. Avec un traitement algorithmique, ces outils permettent d’analyser autrement les profils des candidats, les fiches de postes et les opportunités existantes.
Recrutement, tout a changé !
D’un point de vue quantitatif, parmi tous les outils relevant de l’IA au service des RH, la recherche de candidats est l’activité pour laquelle les applications sont les plus nombreuses. Cela s’avère logique puisqu’il s’agit d’une question importante pour les entreprises et qui, surtout, prend beaucoup de temps. Pour plusieurs prestataires, l’enjeu est de disposer à la fois d’un sourcing (des candidats potentiels) et des données précises et variées sur ces candidats. Dans ce sen, l’intelligence artificielle optimise les processus de sourcing et de tri des candidatures. De nos jours, nombreuses sont les entreprises qui se servent de logiciels en vue de proposer des tests par exemple qui permettent de faire un premier tri.
Qualité de vie, des pas de géant
Lors des dernières années, une bonne qualité de vie, que ce soit au travail ou en dehors des locaux de l’entreprise, est au cœur des préoccupations de la nouvelle génération des collaborateurs. De ce fait, les applications conçues pour faire le suivi la qualité de vie au travail se sont fortement multipliées et développées, visant à proposer des services pour améliorer la vie personnelle des équipes. Dans l’entreprise, il s’agit d’outils qui permettent de suivre le niveau d’adhésion et de motivation des collaborateurs, évaluer le climat social et la QVT, déployer des indicateurs et autres paramètres sociaux.
Une formation de plus en plus fructueuse
Le e-Learning et le blended Learning, entre autres, sont depuis deux décennies, la concrétisation d’une grande transformation numérique en matière d’offre de formation. Les modes d’apprentissage et de transmission du savoir ont été métamorphosés.
Cette transformation a, par ailleurs, poussé à une certaine réflexion quant aux comportements que doit acquérir l’apprenant, notamment les soft skills, c’est-à-dire les compétences relationnelles et émotionnelles, les capacités de curiosité et d’esprit critique, etc. En fait, le numérique offre des possibilités qui permettent d’être dans l’asynchrone et en différé, de multiplier le nombre d’apprenants et de pouvoir travailler à distance.
En guise de conclusion, il faudrait préciser que dans ce contexte transitoire par excellence, la fonction RH est dans l’obligation de se transformer elle aussi. Les outils technologiques jouent certes un rôle important, mais ils ne sont que la partie visible d’un changement plus profond qui touche l’ensemble de nos entreprises. Le monde du travail, de manière générale, est concerné par ces changements qui induisent de nouvelles approches pour répondre à l’apparition de nouveaux questionnements et besoins. L’envahissement du numérique du monde de l’entreprise est en train de se concrétiser par une transformation multidimensionnelle, que ce soit dans l’organisation du travail, dans les relations hiérarchiques et donc dans le management.
Cela dit, les équipes RH et managériales devront accompagner ces mutations en renonçant à ces approches actuelles fondées sur la gestion individuelle, et de jouer désormais un rôle d’architecte ou, en termes de football, de meneur de jeu, pour nourrir les relations et interactions des différentes communautés de l’entreprise.